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Côte d'Ivoire : La population victime des affrontements entre bandes armées
En Côte-d'Ivoire, quatre semaines après le début de la mutinerie d'une partie de l'armée, les forces gouvernementales n'ont pas réussi à déloger les rebelles des villes qu'ils occupent au nord du pays. Ces derniers ont même pu élargir la zone qu'ils contrôlent en s'emparant, apparemment sans rencontrer une grande résistance, de Daloa, importante ville de l'Ouest et ville natale du président Laurent Gbagbo.
L'offensive annoncée de l'armée ivoirienne s'est donc, pour l'instant du moins, soldée par un échec. Elle est, il est vrai, plus entraînée à rançonner la population pauvre qu'à affronter d'autres forces armées. Cela étant, l'intervention de l'armée française d'une part, qui ne se contente pas seulement d'offrir une aide logistique aux forces gouvernementales, et l'intervention de troupes angolaises équipées d'armes lourdes, d'autre part, pourraient bien inverser le rapport de forces et mettre fin à la partition de fait du pays.
S'il est difficile de prévoir quelle sera l'issue de ces affrontements, on sait qui en est la première victime : la population pauvre. Plusieurs centaines de femmes, d'hommes et d'enfants sont déjà morts soit à l'occasion des affrontements entre les deux bandes armées, soit victimes des exactions de la gendarmerie ou des forces gouvernementales.
Mais surtout, le climat est devenu invivable pour tous les immigrés venus du Burkina-Faso, et plus généralement toutes les personnes originaires des provinces du Nord qui, du simple fait de leur nom, de leur ethnie ou de leur religion, sont accusées d'être " la cinquième colonne ", les agents de l'étranger, avec toutes les horreurs que cela implique. L'écoeurante propagande gouvernementale, relayée par de nombreux plumitifs et la radio, aggrave les tensions ethniques et en crée là où il n'y en avait pas.
À Abidjan et dans sa périphérie, certains quartiers pauvres, accusés d'être le repaire de supposés assaillants ont ainsi été détruits, comme la " casse " d'Adjamé et les bidonvilles d'Agban. Gobelet, quartiers misérables situés en plein coeur du quartier Cocody, a également vu débarquer en pleine nuit des dizaines de commandos-gendarmes qui ont fracassé les portes et tout mis sans dessus dessous, rançonnant au passage les pauvres habitants et battant sauvagement ceux qui n'avaient pas d'argent sur eux. Depuis le 19 septembre, il ne se passe plus de jour où l'on ne découvre des corps de personnes sauvagement assassinées durant la nuit par les militaires et les hommes de main du parti de Gbagbo.
Ces affrontements, la population les paie aussi par la flambée des prix, et cela prend des proportions dramatiques pour les familles les plus pauvres qui n'arrivaient déjà pas à joindre les deux bouts. En deux semaines, à Abidjan, le prix du litre d'huile est ainsi passé de 700 à 800 francs CFA ; le kilo de viande, de 1 400 à 1 800, voire 2 000 francs CFA. C'est la même chose pour tous les produits alimentaires : ignames, gombos, piments, etc. Et la situation est sans doute pire encore dans le Nord, soumis de fait au blocus.
En plus de cela, le gouvernement veut extorquer des fonds à toute la population sous prétexte de " contribution à l'effort de guerre " et de faire face " aux agressions terroristes venues de l'extérieur ". Certaines entreprises comme la SIR n'ont pas attendu pour faire les poches de leurs salariés, en prélevant trois journées de leur maigre salaire à titre de contribution.
Si le conflit s'éternise, l'aggravation de la misère et la famine pourraient faire encore plus de victimes que les armes.