MPA (Potasse) : La direction préoccupée par l'incendie... social11/10/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/10/une1784.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

MPA (Potasse) : La direction préoccupée par l'incendie... social

Vendredi 20 septembre, la direction des Mines de Potasse d'Alsace (MDPA) certifiait que l'incendie du site de stockage de déchets industriels Stocamine était maîtrisé. Mais peu de temps après, le délégué-mineur CGT, descendu vérifier, constatait la présence de fumées et de fortes odeurs chimiques. En conséquence, la direction entendait descendre une caméra thermique et envisageait un noyage des galeries et des braises éventuelles à l'azote. Mais mardi 7 octobre rien n'était encore fait et l'impression est que l'enquête sur l'incendie et ses causes n'avance pas, mais au contraire recule. L'incertitude règne donc encore et en attendant, étant donné que l'aérage des galeries incendiées de Stocamine et celles des Mines de Potasse d'Alsace communiquent, et qu'on ne sait toujours pas la nature de ce qui brûle, les mineurs de potasse refusent toujours de descendre.

La direction tâte le terrain...

La direction a tenté quelques pressions pour faire descendre des mineurs, afin de réaliser la séparation de l'aérage entre les galeries de Stocamine et celles des MDPA et redémarrer l'exploitation des mines de potasse. Elle sous-entendait que, si elle ne pouvait pas redémarrer, elle devrait fermer les mines, laissant planer des menaces pour l'avenir. Mais pour cela elle n'a trouvé que quelques ingénieurs ou contremaîtres. Les mineurs, dont une grande partie sont à quelques mois de la retraite (l'exploitation des mines doit fermer en mai 2003), refusent de descendre tant qu'ils n'ont pas d'indications plus claires sur les produits qui ont été enfouis et qui brûlent peut-être encore, ou qui sont susceptibles de brûler à tout moment dans d'autres galeries.

L'enquête administrative diligentée par la préfecture sur la qualité des produits enfouis n'avance pas. Mais on apprend à ce propos qu'il suffit qu'un conteneur soit étiqueté " amiante " pour que la loi interdise qu'on l'ouvre. Or c'est l'industriel qui étiquette lui-même ses déchets, pouvant ainsi mettre ce qu'il veut sans aucun contrôle dans le conteneur. Or bien des conteneurs étiquetés ainsi avec " amiante " ont été descendus...

C'est donc tout le système de sécurité industriel et de contrôle administratif qu'il faudrait remettre en question. On se demande bien dans ces conditions, s'ils ne remettent pas en cause le secret commercial et industriel, ce que pourront faire les soi-disant experts universitaires indépendants choisis par l'administration.

De son côté la direction de Stocamine tente d'opposer ceux qui veulent un emploi à ceux qui pensent en termes de santé. Elle a menacé de mettre au chômage technique ses salariés, qui pour le moment sont affectés à des travaux d'entretien au Jour (en surface). Elle espérait jouer sur la crainte que certains pouvaient avoir de perdre leur emploi, pour leur faire accepter de prendre des risques. Mais elle est tombée sur un os. Les salariés de Stocamine, consultés par la CFDT de l'entreprise, sont favorables au chômage technique. Le directeur de Stocamine se déclare surpris : " Tous les gars que moi j'ai interrogés sont contre le chômage partiel. Ils ont des enfants, des maisons et des voitures à payer... ", s'étonne hypocritement le directeur, qui espérait prendre en otages ses salariés.

...et change d'attitude

Lundi 30 septembre près de 500 mineurs de potasse se sont réunis comme la semaine précédente au puits Amélie, dans une deuxième assemblée générale. Là, ils faisaient savoir bien fort à la direction des MDPA qu'il était hors de question, d'une part de prendre des risques en retournant au travail sans que toute la vérité ait été faite sur les déchets, et d'autre part de perdre un centime sur leur salaire, même s'il s'agit de primes de déplacement, alors qu'ils ne se déplacent pas, ou de primes de nuit, alors qu'ils ne viennent pas la nuit. Ils ne sont responsables en rien pour ce qui est arrivé et ils ne veulent pas en être deux fois les victimes, sur leur santé ou sur leur salaire et l'emploi.

Par ailleurs la CGT proposait de mener sa propre enquête avec le Comité d'Hygiène et de Sécurité (CHS-CT) de l'entreprise et un expert choisi par lui, et d'autre part d'organiser une manifestation des mineurs, de leurs familles, des salariés des entreprises sous-traitantes et de la population du bassin potassique, pour exiger que la vérité soit faite et qu'aucun salarié ou habitant ne paye les conséquences de l'âpreté au gain et de l'irresponsabilité des industriels et de l'administration. L'idée plaisait bien aux mineurs.

Du coup, craignant peut-être que les salariés des entreprises sous-traitantes et la population, qui suivent avec inquiétude la situation à Stocamine, ne viennent appuyer les mineurs, la direction changeait son fusil d'épaule. Elle annonçait officieusement aux syndicats qu'il était fort probable qu'elle abandonne dès maintenant l'exploitation des mines, mais qu'elle garantirait par contre dès aujourd'hui et jusqu'à mai 2003 le salaire complet des 300 mineurs qui devaient partir en préretraite à cette date. Cela voudrait dire pour ces derniers la retraite à 47 ou 48 ans. Par ailleurs, la direction envisageait de mettre en congé avec leur salaire complet des mineurs un peu moins âgés - ce qui signifierait pour certains la retraite à 42 ans - et s'engageait enfin à garder à des travaux d'entretien ou de surface les plus jeunes, tout en leur promettant " quelque chose " qui leur permettrait de ne pas être jaloux de leurs aînés mis en retraite tout de suite.

La nouvelle bien qu'officieuse, a immédiatement fait le tour du bassin, mettant en joie les mineurs. Si la direction ne ment pas, cela voudrait dire qu'ils n'auraient plus à descendre et que leurs revenus ou leurs emplois seraient garantis. A l'assemblée générale du 6 octobre, les questions ont fusé et, même si l'état d'esprit reste à la vigilance devant une direction qui pourrait tenter de démobiliser les mineurs par des promesses sans suite, cela a déjà eu un effet sur les dirigeants syndicaux, qui ne parlaient plus de manifestation mais se sont repliés sur des calculs plus corporatistes. En effet, les employés des entreprises sous-traitantes et les habitants qui vivent au dessus de Stocamine sont exclus du plan de la direction.

En tout cas, une nouvelle assemblée est prévue pour le 14 octobre et certains parlent d'y inviter les salariés des entreprises sous-traitantes et des habitants du bassin.

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