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Leur société
Le mouvement des sans-papiers continue
Commencée il y a 15 jours à Saint-Denis, la mobilisation des sans-papiers s'amplifie et devient nationale. Environ 20 000 d'entre eux, venus de toute l'Ile-de-France et même de province, sont passés se faire inscrire à la basilique. Ces travailleurs clandestins sortent de l'ombre pour réclamer des droits élémentaires. Les Coordinations de lutte des sans-papiers ont maintenant décidé de décentraliser la mobilisation dans tous les départements pour essayer de l'amplifier, en prévoyant des manifestations nationales les 7 et 21 septembre.
Dimanche 1er septembre, 1500 manifestants sans papiers, surtout de Seine-Saint-Denis, se sont regroupés place du Trocadéro, au parvis des Droits-de-l'Homme, pour réclamer leur régularisation. Samedi 31 août au soir, dans un foyer africain de la rue de Charonne à Paris, devant quelques centaines de sans-papiers réunis, un représentant parisien de la Coordination nationale avait annoncé que, lundi matin 2 septembre, des inscriptions seraient prises à la Bourse du travail de Paris, rue Charlot... Et le lundi 2, par le bouche à oreille, sans les médias, 4 000 sans-papiers, les premiers venus dès 5 heures du matin, se sont effectivement rassemblés rue Charlot, beaucoup pensant d'ailleurs qu'en se présentant là, avec leurs papiers, ils allaient être régularisés !
Les quelques membres de la Coordination présents étant complètement dépassés, ce sont des dizaines de militants CGT et SUD mobilisés dans l'urgence qui ont assuré l'accueil et les inscriptions d'une partie de ces milliers de demandeurs, tandis que dans la rue des dizaines de CRS, mobilisés aussi dans l'urgence, canalisaient la foule.
Cet épisode montre les illusions qui règnent actuellement dans la communauté des travailleurs clandestins, mais aussi leur réactivité et leur désespoir.
Chaque jour, au moins jusqu'au 15 septembre, à 15 heures, une manifestation et un dépôt de liste de noms doivent se dérouler devant chaque préfecture des départements d'Ile-de-France. Mardi 3 septembre, la première avait lieu place du Châtelet, pour Paris ; 1500 personnes y ont participé et une délégation a été reçue à la préfecture.
Dans le seul département de Seine-Saint-Denis, les sans-papiers seraient aujourd'hui au nombre de 25 000 à 50 000, et au total, en France, ils seraient plusieurs centaines de milliers. Autant d'hommes et de femmes qui n'existent pas pour les préfectures... Mais qui existent et travaillent dans les usines, sur les chantiers du bâtiment, dans les services de nettoyage et d'entretien, dans les ateliers de confection ou dans la restauration. Autant de travailleurs et leurs familles qui sont livrés aux pires exploitations, aux pires mafias.
Les lois Pasqua-Debré et Chevènement sont des lois antiouvrières et anti-immigrés qui devraient être immédiatement abrogées. En attendant, tous les travailleurs sans papiers doivent avoir le droit de vivre normalement ici et donc d'être régularisés. Aujourd'hui, ce que les travailleurs sans papiers n'ont pas obtenu de cinq ans de gauche au pouvoir, ils pourront peut-être, si leur mobilisation s'étend, l'imposer en tout ou partie à Raffarin et Sarkozy. C'est ce qu'il faut souhaiter.
Pour le moment, le gouvernement répète qu'il n'est pas question de régularisations massives et que le cas par cas restera la règle en appliquant les lois actuelles. Le 27 août, lors de la manifestation au ministère de l'Intérieur, la Coordination de Seine-Saint-Denis avait déposé 1150 dossiers et noms de demandeurs de régularisation. Le préfet du département doit maintenant donner des réponses. Le représentant du ministère avait dit qu'il serait plus humain, plus souple... On va voir combien de dossiers seront acceptés. Mais il est certain que, pour imposer la régularisation de tous les sans-papiers, leur mobilisation doit s'étendre, et le soutien de tous les travailleurs conscients, ici en France, doit se développer.