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Chaos boursier
L'"exemple" britannique
Dans bien des domaines les attaques subies par la classe ouvrière britannique n'ont fait qu'anticiper de quelques années celles visant la classe ouvrière française. Ce pourrait donc aussi être le cas dans le domaine des retraites.
Depuis cinq ans qu'il est arrivé au pouvoir, Blair ne fait pas mystère de ses intentions : mener à son terme la politique que Thatcher avait entamée en son temps, en remplaçant l'ensemble du système actuel par des retraites par capitalisation.
Aujourd'hui, la plupart des travailleurs britanniques touchent d'un côté une retraite d'État et une retraite complémentaire par entreprise. La retraite d'État, financée par un impôt sur les salaires payés par les salariés et les employeurs, a diminué au fil des décennies au point de devenir aujourd'hui insignifiante. Et à terme Blair entend bien en arriver à la suppression totale de cette retraite sans d'ailleurs que cela entraîne une baisse (et encore moins la disparition) de l'impôt qu'elle servait à justifier, en tout cas pour les salariés.
Quant aux retraites complémentaires, il s'agissait de systèmes par capitalisation, financé conjointement par les salariés et les employeurs. Depuis les années 1970, ils faisaient obligation aux entreprises de compenser si nécessaire les à-coups de la Bourse, de façon à ce qu'au total la retraite maximum atteigne environ 75 % du salaire de base des dernières années de travail. Dans les années 1980, une loi promulguée par Thatcher permit au patronat de s'approprier le surplus des caisses de retraite, surplus d'autant plus important que la Bourse n'en finissait pas de monter. Bien des entreprises prirent l'habitude de ne plus verser de cotisations. Et aujourd'hui, elles voudraient bien continuer à le faire, malgré la chute des cours boursiers.
C'est pour répondre aux souhaits du patronat que Blair a fait passer au cours des deux dernières années une série de lois qui, subrepticement, ont permis au patronat de se débarrasser des contraintes qui leur avaient été imposées dans les années 1970.
Sous couvert de permettre aux travailleurs précaires d'avoir une retraite complémentaire par capitalisation (qui, compte tenu de leurs ressources leur assure une retraite négligeable), Blair donna la possibilité au patronat non seulement de priver les nouveaux embauchés des avantages des retraites complémentaires existantes, mais en plus de leur imposer de fait des plans de retraite individuels sans garantie de retraite et surtout sans cotisation patronale ! Inutile de dire que le patronat ne s'est pas fait prier : moins d'un an après l'adoption de cette loi, près de la moitié des grandes entreprises britanniques ont usé des possibilités qu'elle leur offrait.
Avant que la dégringolade actuelle des cours boursiers se produise, les experts estimaient que dès 2015 ces réformes imposeraient à plus de la moitié des retraités l'humiliation de quémander des allocations sociales pour compenser la faiblesse de leur retraite. La chute actuelle des cours ne peut qu'aggraver les choses, même si ceux-ci remontent en partie un jour ou l'autre, car toutes les pertes spéculatives ne seront pas compensées.
C'est pourquoi Blair en est aujourd'hui à remettre à l'ordre du jour une idée qu'il avait mise au rancart jusqu'à présent, celle de porter l'âge minimum de la retraite à 70 ans au moins (il n'y a pas d'âge maximum en Grande-Bretagne).
Faire crever les travailleurs à la tâche, voilà qui résoudrait définitivement le prétendu problème de la retraite !