Remboursez !26/07/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/07/une1774.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Remboursez !

Parmi les séries de l'été, la meilleure n'est sûrement pas celle que nous jouent Chirac et son nouveau gouvernement Raffarin. Ils se donnent pourtant un certain mal pour nous faire croire qu'ils nous réservent un beau cadeau : l'impôt sur le revenu baissera de 5 %, ne dites pas merci ! Chirac se rappellerait-il ses discours sur la " fracture sociale " de 1995 ? En tout cas, il prépare visiblement les mêmes remèdes de charlatan. Parce que cette baisse des impôts n'a rien d'une mesure de justice sociale.

Bien sûr qu'il faudrait baisser les impôts des plus modestes, et pour commencer supprimer la TVA, cette taxe la plus injuste puisque smicards et milliardaires la paient au même taux ! Mais ce n'est pas franchement la politique du nouveau gouvernement. La moitié des foyers, ceux qui ne gagnent même pas assez pour être imposables, ne verront donc pas la couleur de la fameuse baisse d'impôt. Et parmi les autres, les bas salaires n'économiseront que quelques dizaines d'euros par an. Finalement, seuls les gros revenus en profiteront vraiment : 70 % de la ristourne sera empochée par les 10 % des contribuables les plus riches !

Pour les patrons en revanche, la liste des cadeaux n'est pas close. Non seulement le nouveau gouvernement veut aussi baisser l'impôt sur les bénéfices des sociétés, mais il compte encore alléger les charges patronales, et pas qu'un peu. Les entreprises (y compris les plus grosses demande le Sénat) seront exemptées pendant deux ans de charges sociales sur les jeunes non qualifiés âgés de 16 à 22 ans. L'État paiera la différence. Comme d'habitude, cette mesure ne créera aucun emploi ; par contre les patrons devraient encore empocher 650 millions d'euros.

Toute cette générosité finit par coûter cher. Alors Chirac a annoncé dans son discours du 14 juillet qu' " il faudrait être plus modéré sur d'autres dépenses ". Pas celles de la police ou de l'armée, bien sûr : pour la démagogie sécuritaire, le gouvernement est prêt à jeter l'argent à la mer, et par exemple un deuxième porte-avions du type du glorieux Charles-de- Gaulle est en projet. Non, ce que Chirac voulait dire, puisque l'argent public disparaît dans les poches des riches, c'est qu'il y en aura moins pour les services publics. Et tant pis pour les hôpitaux surchargés ou les manques d'effectifs dans l'éducation nationale : Alain Lambert, le ministre délégué au budget, annonce une " diminution nette du nombre de fonctionnaires pour 2003 ". Les employés d'EDF sont particulièrement dans le collimateur : le gouvernement prépare l'ouverture du capital de l'entreprise publique, avec ce que ça signifie de menaces pour ses employés, leur statut et leur retraite.

Les projets d'austérité pour les services publics ne suffisant pas, les tarifs de ceux-ci vont augmenter en rafale. Plus de 4 % de hausse prévue pour le prix de l'électricité ; 9 % pour les tarifs postaux ; à quoi il faut ajouter 3,5 % sur l'abonnement France Télécom, et 4 % sur les prix des carburants avec l'abandon de la " TIPP flottante " qui permettait de modérer le prix à la pompe... Pour la SNCF et la RATP, les augmentations étaient déjà entérinées. Au moment où le gouvernement s'apprête à privatiser 13 entreprises publiques, pour faire rentrer d'autres fonds et équilibrer son budget, et alors que la Bourse s'écroule, il en espère une remontée du prix des actions qu'il s'apprête à mettre sur le marché.

Tant pis si au même moment, en Grande Bretagne où cette politique de privatisation a quelques années d'avance, elle se traduit, après une détérioration sans précédent des services publics comme la santé ou les transports, par une renationalisation et un appel aux fonds de l'État. Du moment que les capitalistes privés se sont rempli les poches au passage !

Malgré les effets d'annonce, on voit que Chirac-Raffarin, après Chirac-Jospin, nous jouent finalement toujours la même version de Robin des Bois à l'envers : voler les pauvres pour donner aux riches. Reste que les travailleurs peuvent leur rendre la monnaie de leur pièce avec une rentrée sociale à la hauteur de leurs attaques. Après tout, en 1995, la grève de novembre-décembre avait obligé Juppé à aller se rhabiller.

Editorial des bulletins d'entreprises l'Etincelle du lundi 22 juillet 2002 de la minorité

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