Maladies professionnelles : La santé des travailleurs après les profits ?12/07/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/07/une1772.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Maladies professionnelles : La santé des travailleurs après les profits ?

Tout comme le nombre d'accidents du travail, en augmentation de 4,5 % pour 2000 par rapport à 1999, les maladies professionnelles, déclarées et reconnues, sont en augmentation.

Leur nombre, selon les dernières statistiques connues, celles de l'assurance maladie, s'est accru de 36 %. Le nombre de décès consécutifs à une maladie professionnelle a augmenté, lui, de 53 % (pour 1999 par rapport à 1998). Et ce chiffre est sous- évalué, puisqu'il s'agit uniquement des maladies professionnelles répertoriées comme telles, et bien des travailleurs ne parviennent pas à faire reconnaître leur maladie comme maladie professionnelle.

Les maladies professionnelles les plus fréquentes sont les troubles musculo-squelettiques, viennent ensuite les affections liées à l'amiante. L'amiante est responsable, à elle seule, selon les sources, de 2000 à 3000 morts par an. 27,7 % des retraités ayant quitté la vie professionnelle entre 1994 et 1996, ont été exposés à l'amiante 14,6 années en moyenne. De ce fait, entre 2000 et 2020, il pourrait y avoir entre 50 000 et 100 000 morts du fait de l'amiante. Et ces calculs reposent sur l'hypothèse que le risque d'exposition à l'amiante est désormais supprimé.

Mais il n'y a pas que l'amiante. Près d'un million de personnes sont en contact à leur travail avec des produits cancérogènes, d'après une enquête lancée par le ministère du Travail. Ce chiffre est peut être plus élevé encore car beaucoup de ces cancers se déclenchent après 65 ans et les effets à long terme de certains produits sont encore mal évalués, comme les éthers de glycol, d'autres solvants, les fibres céramiques utilisées dans les industries du verre, de la sidérurgie, dans les fonderies, ou le bitume.

Une récente circulaire met en place une évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs. Mais elle ne fait que l'inventaire des problèmes. Les chiffres le montrent, la situation ne s'améliore pas pour les travailleurs. Ne serait-ce que faire reconnaître sa maladie comme une maladie professionnelle est déjà un vrai parcours du combattant. Les victimes de l'amiante ont dû se battre des années. Et elles doivent se battre encore pour que la responsabilité des patrons soit reconnue. 2000 à 3000 victimes de l'amiante ont engagé des actions en justice contre leurs employeurs. Dernièrement, la Cour de cassation a rendu une décision favorable aux victimes de l'amiante estimant que les employeurs avaient commis " une faute inexcusable ". La reconnaissance de la " faute inexcusable "de l'employeur permet aux victimes d'obtenir une majoration des indemnités par rapport à celles octroyées pour les autres maladies professionnelles. Les victimes de l'amiante ont à juste titre considéré ce jugement comme un encouragement à continuer la lutte sur ce terrain. Pourtant, selon l'Association de défense des victimes de l'amiante (l'Andeva), même quand la faute inexcusable est reconnue, les victimes ne sont pas indemnisées pour autant.

L'objectif devrait être que des travailleurs ne mettent pas leur santé en danger en travaillant. La pression des patrons dans les usines ne va pas dans ce sens. Protester contre le fait qu'on soit, par exemple, exposé à un produit dangereux, c'est s'exposer... à la répression du patron. Quand un salarié est déclaré inapte à son poste, c'est le plus souvent une occasion pour le licencier, plutôt qu'une opportunité pour lui trouver un autre poste.

La législation n'est que très rarement favorable aux travailleurs. Il a fallu attendre 1997 pour que soit interdite l'utilisation de l'amiante, des années après que les risques avaient été connus. Une nouvelle législation limitant la responsabilité des employeurs serait à l'étude, d'après le journal Le Monde du mardi 2 juillet. Comme quoi en ce domaine on marche vers le progrès à reculons.

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