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Editorial
Contre les coups qu'ils nous préparent
La nouvelle Assemblée commence cette semaine à mettre en musique la politique annoncée par Raffarin la semaine dernière. A part l'amnistie, qui fera peut-être quelques heureux parmi ceux qui ont accumulé des contraventions pour non-paiement du stationnement, les travailleurs n'ont certainement rien de bon à en attendre.
Pour financer la réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu dont profiteront surtout ceux qui ont des revenus élevés, le gouvernement annonce des économies sur les services publics. Si la police et la gendarmerie bénéficieront d'embauches supplémentaires, on annonce en revanche que, dans les autres services publics, les partants ne seront pas remplacés. Cela signifie du travail supplémentaire pour ceux qui restent et des services publics des plus dégradés.
Le gouvernement annonce pour l'année qui vient une réforme des retraites. Bien qu'il ait été discret sur les modalités de cette réforme, elle se traduira par une diminution des retraites de base. Et si le gouvernement se sent assez fort, il reprendra là où Balladur a commencé et où Juppé a échoué : après avoir allongé le temps de cotisation pour le secteur privé, l'allonger pour le secteur public. On arrive à ce résultat aberrant qu'alors que l'intensification du rythme de travail et l'exploitation accrue augmentent la productivité d'année en année, on oblige les travailleurs à travailler plus longtemps et pour une retraite plus faible. Voilà, entre autres, d'où viennent les profits faramineux qui, ensuite, partent en fumée dans la spéculation boursière.
Pour le reste, pour les salaires, pour la Sécurité sociale, le gouvernement en appelle à la négociation entre partenaires sociaux. Mais, dans le contexte actuel, cela signifie que le patronat impose à peu près tout ce qu'il veut imposer, en faisant cautionner ses décisions par des syndicats assez dociles pour les contresigner.
En matière de privatisations, le gouvernement de droite continuera la politique menée par la gauche. Préparée sous Jospin, la privatisation d'EDF et de GDF se poursuivra sous Raffarin. D'autres secteurs suivront, avec toutes les conséquences que la recherche du profit implique pour des services utiles à la collectivité. Plus les jours passent, plus il se révèle, par exemple, que la responsabilité de la récente catastrophe aérienne au-dessus de l'Allemagne incombe à la société privée à qui a été concédée la gestion du contrôle aérien dans le secteur où le crash s'est produit et qui fait travailler des contrôleurs en nombre insuffisant sur du matériel défectueux.
Et, bien entendu, Raffarin ne fera pas plus que Jospin contre les plans de licenciements qui se multiplient.
Reste la politique sécuritaire, argument électoral de Chirac. Elle se concrétise par de l'argent supplémentaire pour la police et la gendarmerie, par des opérations " coup-de-poing " dans des quartiers populaires et par l'agitation médiatique du ministre de l'Intérieur. Cela ne changera rien à la vie dans les cités populaires mais cela est fait pour plaire à l'électorat réactionnaire.
La même démagogie sécuritaire autorise l'emprisonnement dans des prisons-taudis des adolescents dès 13 ans alors qu'on se prépare à amnistier les affaires politico-financières où sont mouillés des députés, des ministres et jusqu'au chef de l'État.
Sur le plan parlementaire comme sur le plan gouvernemental, la politique des cinq prochaines années est toute tracée entre une droite qui dispose de tous les leviers du pouvoir et une gauche principalement préoccupée de faire oublier ses cinq ans de gestion gouvernementale.
Mais ce qui est décisif, ce n'est pas ce qui se passe au Parlement. Les cinq ans passés ont amplement montré que le monde du travail n'a rien à attendre du gouvernement, quelle que soit sa couleur politique. La classe ouvrière a la capacité de réagir et a la force de faire reculer le patronat et le gouvernement. Ceux qui nous gouvernent en ont fait l'expérience dans le passé et parfois à des moments où ils s'y attendaient le moins.