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Leur société
Dammarie-lès-Lys (77) : Campagne antijeunes : "nos mots sont nos armes"
À Dammarie-lès-Lys, dans la banlieue sud de Melun, la police est intervenue de manière massive et spectaculaire, lundi 24 juin.
Dès 6 h 30 du matin, deux compagnies de CRS, une brigade départementale et un groupe du Raid ont investi l'immeuble du Bas-Moulin, pour protéger une entreprise de nettoyage venue enlever les banderoles et effacer les tags ornant une partie inoccupée de l'immeuble.
Ces banderoles et ces tags avaient été placés par des jeunes de la ville pour rendre hommage à Mohamed, tué à la suite d'une bavure policière, et en même temps pour marquer leur colère contre la police.
Il s'agissait de tenter d'isoler le comité de soutien à Mohamed Berrichi. Cela fait maintenant plusieurs semaines que Kader, le frère de Mohamed, et ses amis multiplient les manifestations et les interventions dans les réunions politiques et les fêtes associatives pour que la vérité soit faite. La politique sécuritaire, ils sont bien placés pour le savoir, ne règle aucun des problèmes dans les quartiers populaires. Mais l'actualité de l'association dérange les autorités et, en premier lieu, le député-maire UMP de la ville, Jean-Claude Mignon.
Le comité de soutien se désolidarise complètement des quelques actes isolés que les autorités veulent lui imputer et dénoncent les accusations du maire qui les a traités de " petits terroristes de banlieues " et les a accusés du vol de matériel sono. Certains d'entre eux sont " connus des services de police ", explique le maire, pour avoir participé, il y a cinq ans, aux émeutes après la mort par balle d'un autre jeune du quartier. Mais aujourd'hui, les mêmes, cinq ans plus tard, expliquent que ce n'est pas en cassant et en brûlant des voitures que l'on est le plus efficace. Certains d'entre eux se sont investis dans les associations du quartier. L'association " Bouge Qui Bouge ", que préside Kader Berrichi, a pour but d'assurer le soutien scolaire des plus jeunes et de les encadrer lorsqu'ils jouent au pied de l'immeuble du Bas-Moulin. Cette présence permanente est appréciée de tous, des parents jusqu'aux tout-petits.
Aujourd'hui, sous prétexte que l'association s'est solidarisée avec le comité de soutien à Mohamed, les autorités tentent de la priver de tout moyen de fonctionnement. Lundi 24, en perquisitionnant, les policiers ont défoncé la porte à coups de bélier. Ils ont en partie saccagé le local et ont jeté au sol des livres (romans, livres scolaires, cahiers de vacances...). Face au désastre, les petits remontaient le moral des grands en leur disant : " C'est pas grave, on va tout ranger ".
Mais les attaques s'enchaînent : Kader, en tant que président de l'association, a été convoqué par huissier pour le mardi 25 juin, au tribunal des référés. L'Office HLM, présidé par un membre de l'UMP, demande à la justice l'expulsion de l'association de ses locaux.
Vendredi 28 juin, le juge des référés a rendu son délibéré en ordonnant l'expulsion de l'association de son local. Il appuie son jugement sur le fait que l'association a contribué à entretenir " l'agitation " et " le trouble à l'ordre public " après la mort de Mohamed. C'est une manière de dire qu'une association n'a pas le droit d'exprimer son opinion et sa solidarité avec un mouvement d'émotion et de protestation. Face à cela, l'association a décidé de s'installer devant le local, sous une tente, avec une banderole : " BOUGE QUI BOUGE S.D.F, liberté d'expression bafouée ". La police, qui se déplace dans les quartiers portières ouvertes avec gilets pare-balles et flashball à la main, est intervenue pour faire décrocher une banderole installée entre deux arbres. Pour montrer leur intention d'agir sans provocation, les membres de l'association ont déplacé la banderole. Lundi 1er juillet, c'est sans crainte du ridicule que des policiers casqués, cachés derrières leurs boucliers et leurs armes, ont " protégé " la fermeture du local tandis que les membres du comité de soutien... prenaient le petit déjeuner en commentant la presse du matin ! Ils ont décidé de faire appel aux médias, associations, forces politiques et militantes pour populariser leur mouvement. Un débat est prévu samedi 6 juillet, avec barbecue et, si possible, projection des films des dernières interventions policières. Des tracts sont distribués et une pétition circule.
Aujourd'hui, l'association et le comité de soutien restent déterminés à se faire entendre et respecter. Comme les jeunes l'affirment : " Aujourd'hui, nous sommes en insécurité puisque l'on porte atteinte délibérément à nos droits fondamentaux tels que la liberté d'expression, d'association, de circuler et au-delà d'exister. Si nos mots sont nos armes, alors nous sommes des terroristes de quartiers. La seule crainte que Monsieur Mignon ait le droit d'avoir est celle de notre action politique. "