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Politique
Vers un scrutin encore moins représentatif ?
Il a été beaucoup question, lors de ces élections, de la " dispersion des candidatures " qui, selon les uns, favoriserait le Front National - et on nous a agité sous le nez le spectre du maintien du FN au second tour dans 300 circonscriptions - ou qui, selon d'autres, découragerait les électeurs, d'où le fort taux d'abstentions. La droite présidentielle, que ce soit par la voix de Raffarin ou de Fillon, ministre des Affaires sociales, a avancé la nécessité de revoir le mode de scrutin, afin de pallier " l'instabilité " qui résulterait de ces candidatures multiples.
" Pour que les institutions fonctionnent bien, a déclaré Fillon, il faut deux grandes formations ", et éviter qu'il y ait des triangulaires au second tour. D'où le projet de limiter à deux le nombre de présents au second tour, comme pour les élections présidentielles. Il y avait déjà un couperet destiné à éliminer les candidats n'atteignant pas 12,5 % des électeurs inscrits (ce qui représente entre 17 et 20 % des votants), qui ne pouvaient pas se maintenir au second tour. Pour limiter le nombre de candidatures au premier tour, il serait aussi question de revoir le mode de financement des partis, en mettant un seuil à 3 % des voix pour bénéficier des subsides de l'État aux partis présentant au moins 50 candidats. Comme si nombre de formations se présentaient pour l'argent et pas pour soumettre leur politique aux électeurs. Cette proposition permettrait aux formations les plus riches de bénéficier de la manne de l'État, en en écartant les autres.
Réserver les subventions aux partis majoritaires n'empêchera pas, et c'est heureux, que se présentent tous ceux qui ont envie de défendre un programme. La plupart d'entre eux ne tirent aucun bénéfice matériel de ces élections puisqu'ils doivent financer leurs frais de campagne, et y contribuent par le bénévolat de l'action militante.
Quant à dire qu'une majorité forte permettrait à un gouvernement d'être plus efficace, il faut entendre ce qu'il y a derrière le mot majorité et derrière le mot efficace. L'UMP arrive en tête avec 34,05 % des votants, qui ne représentent déjà que 25,09 % des inscrits. Le système électoral actuel est loin de représenter la majorité puisque, avec un quart des électeurs inscrits, la droite est pronostiquée gagnante avec une majorité écrasante de députés à l'Assemblée. Mais même ainsi élue cette majorité sera-t-elle stable ? Jusqu'à quand ? Et surtout pour faire quelle politique ?
De plus chaque élection risque de remettre ce résultat en question puisqu'il suffit d'un petit déplacement de voix pour que change cette majorité.
Si le prochain gouvernement modifie le mode de scrutin, comme il en a annoncé l'intention, rien ne dit que cela augmentera son efficacité, mais en tout cas, la représentation des citoyens et de leurs opinions y perdra encore plus puisque seuls deux " grands " partis auront des élus.