Vivarte (Ex-chaussures André) et Essilor à Créteil (94) : Non au travail du dimanche, non à la flexibilité !31/05/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/05/une1766.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Vivarte (Ex-chaussures André) et Essilor à Créteil (94) : Non au travail du dimanche, non à la flexibilité !

Lundi 13 mai, le conseil municipal de Créteil (Val-de-Marne) devait donner son avis à la préfecture du Val-de-Marne sur la demande de certaines entreprises de faire travailler du personnel le dimanche. Il s'agissait d'une part du fabricant de lunettes Essilor pour un travail informatique, d'autre part des magasins La Halle aux chaussures et La Halle aux vêtements. Une majorité, de l'extrême droite au PS, s'est prononcée pour, les élus Lutte Ouvrière, PC et Verts s'étant prononcés contre.

Sur la question du travail le dimanche, la majorité municipale de gauche s'est divisée : les conseillers municipaux socialistes, alliés à la droite et à l'extrême droite, ont fait pencher la balance en faveur de la demande patronale. Les Verts se sont opposés seulement sur la demande d'ouverture des magasins, tandis que le Parti Communiste, la plupart du temps solidaire du maire socialiste, a cette fois décidé de voter contre les deux demandes. Comme les deux élus Lutte Ouvrière, Daniel Gendre et Aline Février.

Bien sûr, ont affirmé ceux-ci, le problème n'est pas le dimanche en soi, car il serait absurde de voir des activités nécessaires s'interrompre simplement pour respecter une tradition religieuse, qu'il s'agisse du dimanche de la tradition chrétienne ou d'autres jours pour d'autres religions. Mais la question est ailleurs. Les élus de Lutte Ouvrière se sont affirmés " solidaires des salariés qui luttent contre les différentes formes de flexibilité des horaires que le patronat cherche à instaurer dans l'unique but d'augmenter ses profits ". Or, ont ils précisé, " celui-ci veut imposer de plus en plus des horaires de travail au mépris de la vie des salariés, qu'il s'agisse du travail de nuit pour les femmes, de l'amplitude pour les chauffeurs routiers ou en ce qui nous concerne ici du travail le dimanche ".

Sans doute des magasins, comme La Halle aux chaussures et La Halle aux vêtements, sont fréquentés par une clientèle populaire, que l'ouverture le dimanche pourrait arranger ? Mais il serait bien naïf de croire que c'est dans le souci d'une meilleure organisation sociale que les dirigeants de la grande distribution veulent ouvrir des magasins le dimanche. Leur problème, c'est que la rotation de leur capital s'effectue le plus vite possible, d'où leur intérêt pour capter une clientèle supplémentaire le dimanche, aux dépens de leurs salariés.

Le groupe des Chaussures André, rebaptisé Vivarte, auquel appartiennent les magasins La Halle aux Chaussures et La Halle aux vêtements emploie une dizaine de milliers de personnes sous beaucoup d'autres enseignes : Chaussland, Besson, Creeks, Liberto, Orcade, Minelli, San Marina, Caroll et Kookaï. Les dirigeants de Vivarte contrôlent le tiroir-caisse de quelque 2300 points de vente.

Affichant 47,9 millions d'euros de bénéfices, le groupe n'en poursuit pas moins le plan de restructuration qui s'est déjà traduit par la suppression de 400 emplois sur 500 annoncés l'année dernière, en même temps que les suppressions d'emplois à Danone et Marks et Spencer.

Pendant des années, le groupe André a ouvert de nombreux magasins le dimanche en toute illégalité. A La Halle aux vêtements et La Halle aux chaussures de Créteil, cela s'est pratiqué pendant au moins sept ans, de mémoire d'employée. C'est seulement l'an dernier que la direction avait dû y renoncer, du moins provisoirement. Vivarte avait perdu plusieurs procès, menés à l'initiative de la CFTC et d'une organisation de détaillants qui lutte contre la concurrence des grandes surfaces.

On assiste donc aujourd'hui à une nouvelle offensive. A Créteil, la direction a demandé des volontaires, mais n'en a pas trouvé. Mais évidemment, les moyens de pression ne manquent pas : avec un salaire payé au Smic et un emploi précaire, un patron peut faire demander des heures supplémentaires prétendument au volontariat. Et il peut y avoir d'autres formes de pression plus directes. Ainsi, en février 2000, les syndicats ont protesté parce qu'un couple responsable d'un magasin du même groupe, dans la Somme, avait été licencié pour s'être opposé à l'ouverture du magasin le dimanche. Autre exemple : au centre de répartition des marchandises à Issoudun, c'est dans l'accord sur les 35 heures que la direction a tenté d'inclure l'obligation de dimanches travaillés. Le syndicat CFTC dénonce " un harcèlement moral systématique ". France Soir parle de " salariés à bout de souffle " à propos d'une salariée de La Halle aux vêtements de Dijon licenciée pour avoir reçu un pourboire de 40 F tandis qu'à Villefranche-de-Rouergue, une autre salariée a été poussée à signer une fausse confession " Il n'y a donc aucune raison de faire confiance à la direction de cette entreprise sur la façon dont elle pourrait trouver des " volontaires " pour s'adapter à de nouveaux horaires qui arrangent son chiffre d'affaires ", ont déclaré les élus Lutte Ouvrière de Créteil. Ils ont ajouté que les élus qui accepteraient la demande d'ouverture du travail le dimanche soutiendraient en fait une offensive patronale qui se manifeste à Créteil, et ailleurs !

Le maire socialiste s'est alors agacé que " certains " veuillent faire de cette question un débat " idéologique ". Lui qui se veut réaliste et pragmatique a proposé de " dire oui pour une durée déterminée afin de mesurer l'impact de la décision à tous les niveaux ". Comme s'il était acceptable que les dirigeants d'une grosse société et le maire d'une commune puissent ainsi bousculer comme cela leur chante la vie des salariés !

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