USA : Une centième erreur capitale26/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1761.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

USA : Une centième erreur capitale

Aux Etats-Unis, un centième condamné à mort vient d'être innocenté par la justice américaine, après dix années passées en prison. Accusé de meurtre, cet homme, qui avait toujours clamé son innocence, a été disculpé par des tests d'ADN.

Ce chiffre de cent personnes innocentes, jugées, condamnées à mort et emprisonnées pendant des années dans le couloir de la mort, disqualifie à lui seul le système judiciaire qui permet toujours, dans 32 États américains, d'assassiner sur décision de justice.

Dans la plupart des cas, ces personnes ont été condamnées parce qu'elles étaient mal défendues, car trop pauvres pour se payer un avocat et que l'avocat qui leur a été commis d'office n'a eu ni le temps ni les moyens de réunir les preuves de leur innocence ou était incompétent ; ou parce que la police leur a extorqué des aveux sous la contrainte ou a escamoté des preuves qui auraient permis de les disculper.

Cet état de choses met en lumière l'hypocrisie d'un pays qui se prétend le plus avancé du monde en matière de droits de l'homme, qui se présente comme le champion de la " lutte du bien contre le mal " et qui applique la peine de mort de la façon la plus odieuse. Sur plus de 750 personnes qui ont été exécutées depuis le rétablissement de la peine de mort en 1977, plus de 80 % l'ont été dans les Etats du Sud, dont un tiers dans le seul Etat du Texas (dont George W. Bush était le gouverneur avant d'être élu président) ; et 60 % des condamnations à mort du Texas ont été prononcées dans un seul comté, celui de Harris ! A cette disparité géographique, s'ajoute une discrimination raciale : la moitié des condamnés à mort sont des Noirs, dont l'immense majorité sont accusés d'avoir tué des Blancs, et plus de cinquante d'entre eux ont été condamnés à mort par des jurys entièrement composés de Blancs.

A ces injustices flagrantes, les États américains qui pratiquent la peine capitale ajoutent l'ignominie, quand ils envoient à la mort des personnes dont il a été médicalement établi qu'elles souffraient d'arriération mentale ou de maladies mentales graves comme la schizophrénie. Les États-Unis sont aussi le champion du monde de l'exécution des mineurs. Déjà quinze condamnés, âgés de moins de 18 ans au moment des faits, ont été exécutés et quatre-vingts attendent dans le couloir de la mort, en contradiction flagrante avec deux traités internationaux pourtant signés par les Etats-Unis.

Nombre de condamnés à mort ont sans doute commis des crimes horribles. Mais ce n'est pas en les éliminant de façon barbare qu'on fait reculer la violence. En 2000, une étude du New York Times a montré que, dans les Etats qui maintiennent la peine capitale, la criminalité n'a pas baissé davantage que dans ceux qui ne l'appliquent pas.

Dans le reste du monde, le mouvement est clairement au recul de la peine de mort : depuis 1977, date à laquelle les Etats-Unis ont rétabli la peine capitale, plus de 60 pays ont aboli la peine de mort et aujourd'hui 109 pays sont abolitionnistes. Mais pour George W. Bush, comme pour son prédécesseur Bill Clinton et leurs émules dans de nombreux Etats, la peine de mort est trop rentable électoralement pour qu'ils s'y opposent. Les Etats-Unis continueront donc, malgré cette centième erreur judiciaire reconnue, d'assassiner au nom de la loi.

Actuellement, 3 000 condamnés attendent dans les couloirs de la mort des prisons américaines. Combien d'entre eux sont innocents ?

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