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Elections présidentielles
Quelles solutions ?
Toutes les prétendues " solutions " proposées par Jospin et Chirac au problème des retraites partent d'un même constat : à cause de l'augmentation prévisible du nombre des plus de 60 ans (due au " baby boom " qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale) et de l'allongement de la durée de la vie, il y aura demain moins d'actifs et plus de retraités qu'aujourd'hui. Ils en tirent tous deux la conclusion que les caisses de retraite seront déficitaires à partir de 2005, et qu'il faut donc prendre des mesures.
Toutes celles qui ont déjà été prises ou qu'ils proposent vont dans le même sens : diminuer les retraites, en versant des retraites moindres et en les versant moins longtemps. L'allongement du nombre d'annuités nécessaires pour toucher une retraite pleine et entière (40 ans au lieu de 37,5 ans, mesure déjà en vigueur dans le privé et qu'ils voudraient étendre au secteur public), la modification de la base de calcul des retraites (les 25 dernières années au lieu des 10 meilleures années) ou l'augmentation de l'âge de départ à la retraite (à laquelle Jospin et Chirac se sont engagés lors du sommet européen de Barcelone il y a quinze jours) vont dans ce sens.
Ces " solutions " n'en sont pas. Elles s'en prennent directement au niveau de vie des futurs retraités sous prétexte de protéger les revenus des actifs de demain. Cette hypocrisie est d'autant plus scandaleuse qu'il y a évidemment des solutions. Il est parfaitement possible de maintenir le niveau actuel des retraites sur la base de 37,5 annuités pour tous sans augmenter les cotisations des actifs.
Il faudrait d'abord, tout simplement, augmenter la part des salariés dans les richesses produites, par exemple, en augmentant les salaires. En effet depuis 1980, la part des salaires n'a cessé de diminuer par rapport au total des richesses produites : elle est passée de 70 % en 1980 à 60 % en 1997, et les ressources des caisses de retraite ont diminué du même coup, au moins relativement. En sens inverse, augmenter les salaires de 1 %, ce serait 13 milliards de francs en plus par an pour les caisses de retraites.
Ensuite, en s'attaquant vraiment au problème du chômage. Un million de chômeurs en moins, ce serait 80 milliards de francs de recettes en plus pour les retraites.
Enfin, et surtout, il faut prendre l'argent où il est. Pas dans les caisses de la Sécu ou dans un " fonds spécial " comme le propose Jospin, car cela revient encore et toujours à faire payer les salariés. Non, il faut supprimer les exonérations de cotisations accordées si largement aux entreprises par tous les gouvernements, qui ainsi ont eux-mêmes créé en grande partie la situation actuelle ; et ne pas hésiter, si nécessaire, à prendre sur les profits, en particulier les profits financiers des grandes entreprises, qui échappent aux prélèvements sociaux. Celles-ci n'en mourraient pas : entre 1970 et 2000, la productivité en France a presque doublé et on prévoit qu'elle doublera encore d'ici 2040. Seules les classes les plus riches en profitent, en accumulant des fortunes colossales grâce aux profits en hausse. Pourquoi les retraités, dont le travail a créé cette richesse, n'en profiteraient-ils pas ?
Il y aura plus de retraités demain, qui vivront plus longtemps ? Il faut s'en réjouir et se donner collectivement les moyens de leur assurer une retraite décente. C'est possible. Mais le futur président, qu'il soit de droite ou de gauche, nous dit déjà qu'il faudra l'y contraindre.