La Poste : De plus en plus loin du Service Public12/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1759.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La Poste : De plus en plus loin du Service Public

La Poste, qui affiche une perte de 170 millions d'euros pour l'année 2001, explique qu'elle a dû dépenser sans compter pour acheter des entreprises qui distribuent des colis, notamment en Allemagne.

Il s'agirait, selon ses dirigeants, de préparer l'avenir. En fait, c'est une façon de préparer leur propre carrière. Aujourd'hui serviteurs de l'Etat, ils ne dédaigneraient sans doute pas de servir de nouveaux actionnaires si La Poste se transformait. En tout cas, l'avenir qu'ils envisagent tourne le dos au service public. D'ailleurs l'actuel président de La Poste, Martin Vial, a déjà une expérience en ce sens. En 1990, il organisa la coupure en deux des PTT pour le compte de Paul Quilès, le ministre socialiste de l'époque, et cette opération fut le prélude à la privatisation des Télécoms, considérés à l'époque comme extrêmement rentables, tandis que La Poste restait entièrement aux mains de l'Etat. Aujourd'hui, il rivalise d'idées avec un sénateur de droite pour faire de La Poste une entreprise capitaliste comme une autre.

Déjà, La Poste a été morcelée en différents tronçons, dont certains sont des filiales, et les chèques postaux sont rebaptisés " services financiers de La Poste ". La direction montre du doigt les 12,5 millions de personnes qui détiennent moins de 150 euros sur leur livret de caisse d'épargne. Il s'agit notamment de retraités et de RMIstes qui y placent leur maigres ressources. L'addition de toutes leurs fortunes, si l'on peut dire, ne représente pas même 1 % de l'ensemble des dépôts. C'est pourquoi ils sont jugés encombrants par des dirigeants qui ne jurent que par le " produit net bancaire ", en hausse l'année dernière.

Que les queues soient encore plus longues que d'habitude les jours où les allocations et le RMI sont payés, les dirigeants de La Poste et le gouvernement s'en moquent également. Leur souci est de transformer l'entreprise en une banque comme les autres et, pour eux, les usagers obligés d'avoir recours à La Poste comme à un service social sont considérés comme des gêneurs. La tension nerveuse de ceux qui travaillent aux guichets et les difficultés des plus démunis ne font pas partie du bilan.

De même que les petits livrets A, le maintien d'une présence postale dans les petites communes est considérée comme un " surcoût ", et La Poste fait pression sur les municipalités pour qu'elles mettent la main à la poche, sous peine de suppression de ce service.

Quant au courrier, il est à deux vitesses. La publicité ainsi que le courrier des entreprises vers d'autres entreprises (" business to business " dit La Poste) ont un traitement de faveur. Pendant ce temps, le commun des usagers subit de plein fouet la diminution des effectifs.

Il faut dire que, pour remplacer 20 000 postiers partis à la retraite en deux ans, le gouvernement n'a proposé que 6 000 postes aux concours. Et les emplois précaires, dont certains à temps partiel forcé, continuent de croître. La détérioration des conditions de travail s'est encore accentuée à l'occasion du passage aux 35 heures, comme l'a montré le nombre important de grèves qui ont eu lieu contre le manque de personnel.

Dans ces conditions, le courrier ne peut pas être acheminé correctement. La Poste avoue elle-même que près d'une lettre sur quatre n'arrive pas le lendemain. La proportion n'est sûrement pas surestimée. De leur côté, les facteurs peuvent comptabiliser les " quartiers à découvert ", c'est-à-dire les secteurs où le courrier ne peut pas être distribué, faute de personnel, ce qui peut arriver plusieurs fois dans la semaine. Et quand le quartier est à nouveau distribué, c'est une charge plus lourde qui attend les facteurs.

Mais la dégradation du service public n'empêche pas la direction de La Poste et le gouvernement de penser à une nouvelle augmentation du prix du timbre. Cela va même de pair. Les petits usagers n'existent pas vraiment pour eux, sauf quand il s'agit de payer.

Alors que le souci de gérer La Poste dans un but unique de rentabilité est de plus en plus apparent, il faudrait au contraire commencer à contrôler sérieusement l'entreprise et ses tarifs, à déterminer le nombre de personnes à embaucher, à la fois pour améliorer les conditions de travail des postiers et permettre, en priorité aux plus démunis, de trouver un service de proximité.

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