Jospin, cinq ans d'amnésie12/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1759.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Elections présidentielles

Jospin, cinq ans d'amnésie

Inquiet de constater que Jospin piétine dans les sondages, qui atteignent péniblement 20 % au premier tour, son entourage s'active pour relancer à la hâte la campagne de son poulain. Mauroy, ancien Premier ministre de Mitterrand, lui conseille de ne " pas oublier dans nos discours (...) notre électorat populaire ". Du coup, le mot de " modernité ", un mot à la mode du Medef aux directions syndicales, et qui faisait partie des slogans des débuts de campagne de Jospin, a été mis au placard. Le Premier ministre continue à dire qu'il veut " Présider autrement " - ce qui ne veut rien dire et n'engage à rien -, mais en remisant ses premières déclarations sur " son projet (qui) n'est pas socialiste " pour se présenter en " candidat du progrès social ". Ces variations verbales sont censées faire la différence avec le Jospin-candidat première mouture... à condition d'oublier ses cinq ans de gouvernement marqués non pas par le progrès, mais par la régression sociale.

Jospin tente aussi d'autres " coups ". Un jour, il promet " Zéro SDF " pour dans cinq ans, et on n'en parle plus le lendemain, tant la ficelle est grosse. Un autre jour, pour faire " jeune ", il se prononce pour la majorité à 17 ans ou pour la légalisation du cannabis. Puis ce dernier pétard mouillé, est vite oublié. Restent les bons vieux trucs : Hollande, premier secrétaire du PS, évoquant ces jours-ci une forte diminution d'impôts pour les hauts revenus, Jospin lui signifie qu'il est allé trop loin.

Porte-parole de Jospin, Strauss-Kahn a été chargé d'expliquer la " nouvelle " campagne de Jospin : " Il ne faut pas, dit-il, oublier les thèmes traditionnels de la gauche comme le pouvoir d'achat, l'emploi, la lutte contre les inégalités ". Si oubli il y a eu, il aura duré cinq ans ! Mais ce n'en est pas un, c'est un choix de gouvernement, un choix social opposé aux intérêts des travailleurs, qu'ont fait Jospin et les partis qui le soutiennent. Et il est révélateur de ce qu'est et de ce que veut le candidat du PS que, pour exposer son prétendu cours nouveau de " candidat du progrès social ", Jospin ait choisi Strauss-Kahn, cet avocat d'affaires et ex-ministre de l'Economie, adulé des marchés pour l'action qu'il a menée en tant que grand argentier du pays. Et l'entendre parler de pouvoir d'achat ou d'emploi, voilà qui pourrait rester en travers de la gorge de bien des électeurs populaires encore tentés de voter Jospin.

D'autant plus que Jospin, lui, pas plus maintenant qu'avant, ne peut ni ne veut s'engager en rien sur ce qui pourrait contrarier le patronat. Ainsi, lundi 8 mars en Auvergne, il a évoqué l'idée d'une retraite avant 60 ans pour ceux qui auraient cotisé 40 ans. Mais il s'est refusé à parler d'un retour aux 37,5 annuités d'avant Balladur. Et il s'est posé en champion d'un " équilibre équitable " entre le régime public de retraite et un " dispositif additionnel ", privé, qui fait piaffer d'impatience les compagnies d'assurances et le patronat, et qui, même si Jospin ne le dit pas trop haut à la veille des élections, signifie, à terme, la remise en cause du système actuel, en particulier par des mesures qui viseront à aligner le régime de la Fonction publique sur celui du secteur privé. C'est exactement ce que Juppé avait tenté de faire en 1995.

Même quand certains disent le voir mettre " le cap à gauche ", Jospin persiste et signe : son camp n'est pas celui des travailleurs, mais celui du patronat.

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