Sharon : La " guerre totale " contre le peuple palestinien05/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1758.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Sharon : La " guerre totale " contre le peuple palestinien

Avec la prise du QG d'Arafat, la destruction de sa garde personnelle et l'occupation de Ramallah puis de Kalkilya, Tulkarem, Bethléem, Sharon poursuit son objectif : la guerre totale contre les Palestiniens, la destruction de leurs organisations et de l'embryon d'Etat que constituait l'Autorité palestinienne. Et la population palestinienne des villes occupées est la première victime de cette nouvelle offensive militaire israélienne. Dans Ramallah, zone militaire fermée, le couvre-feu autorise les soldats à tirer sur toute personne surprise dans la rue. L'occupation des villes de Ramallah puis de Kalkilya dimanche, s'est traduit par le ratissage des immeubles et des maisons, les rafles systématique des hommes de 16 à 45 ans qui sont fouillés et internés pour être interrogés.

Cette politique de terreur et d'humiliation de la population palestinienne entière, Sharon la justifie par la soi-disant chasse aux terroristes. Il s'est saisi du sanglant attentat suicide de Netanya qui avec 22 morts et plus de cent blessés a choqué la population israélienne, pour déclencher dès le lendemain l'invasion de Ramallah, où Arafat était déjà bloqué par l'armée. La perspective d'une nouvelle escalade était déjà prévisible : l'offensive israélienne a alimenté une nouvelle série d'attentats suicides au coeur d'Israël, à Tel Aviv, Haïfa, Jérusalem. Et chaque attentat meurtrier comme celui de Haïfa avec ses 16 morts et sa quarantaine de blessés a permis à Sharon de justifier une nouvelle extension de l'intervention militaire et le contrôle de nouvelles villes de la zone autonome palestinienne. Car Sharon, l'homme de la guerre du Liban, l'homme des massacres de Sabra et Chatila, mène d'abord et avant tout une politique d'expansion et de conquête et vise à la constitution du " Grand Israël " . Et il est prêt à en faire payer le prix fort à la population israélienne. En provoquant cyniquement une radicalisation des organisations palestiniennes vers le terrorisme aveugle, il vise à faire admettre à la population israélienne qu'elle n'a plus d'autre choix que de le suivre. C'est sous couvert de " lutte contre le terrorisme " , et de " défense du monde libre " , que Sharon dénie ainsi au peuple palestinien tout droit à des territoires, à un Etat et à une existence libre dans la région.

Sharon bénéficie de la caution et du soutien de la gauche travailliste au gouvernement. " Je reste dans le gouvernement et je lutte pour défendre mes idées. Il faut d'abord faire preuve d'unité et se battre " , déclarait Pérez, Ministre travailliste des Affaires Etrangères, dimanche dernier. Et puis, la politique de Sharon fait suite à celle de la gauche israélienne qui s'était prévalue de la signature des accords d'Oslo. Car derrière la façade de ces soi-disant accords de paix, il y avait la politique consistant à découper le territoire palestinien en morceaux, sans communications entre eux, à multiplier les check points, les routes militaires, pendant que les Palestiniens étaient expulsés de zones entières et que la colonisation de leurs territoires était poursuivie à grande échelle. Cette politique a conduit à l'étranglement économique et à la révolte des Palestiniens. Sur ce terrain préparé par la gauche au gouvernement, la provocation de Sharon sur l'Esplanade des Mosquées en septembre 2000 n'a été que l'étincelle qui a mis le feu aux poudres... et lui a permis d'accéder au pouvoir.

Sharon bénéficie pour sa politique d'un autre appui de taille, celui de l'impérialisme américain, lancé à l'échelle mondiale dans sa croisade contre " l'axe du mal " , et qui après l'Afghanistan menace d'intervenir contre l'Irak. Même si les USA et George Bush ont récemment voté des résolutions de l'ONU en faveur de l'existence d'un Etat palestinien, même s'ils ont envoyé le général Zinni en vue d'une nouvelle négociation avec Arafat comme représentant du peuple palestinien, et même s'ils ont obtenu des Etats arabes de signer la proposition de paix du prince saoudien Abdallah, ils ont appuyé clairement et sans ambages l'offensive de Sharon, au nom du droit de l'Etat israélien de se défendre contre le terrorisme.

Quant aux pleurnicheries hypocrites des impérialismes européens, parmi lesquelles celles de Chirac et Jospin, elles ne peuvent masquer leur passivité complice et ne sont pas plus que les résolutions sans lendemain de l'ONU, capables d'arrêter cette guerre ni d'apporter la moindre perspective pour les deux peuples.

L'espoir pour les Palestiniens d'obtenir leurs droits légitimes, repose non seulement sur leur combat, mais aussi sur la solidarité des peuples de la région, comme elle s'est notamment manifestée en Egypte et en Jordanie. Et également sur l'apparition au sein même de la population israélienne d'un courant hostile à l'occupation des territoires et à l'intervention militaire israélienne, à condition que ce courant se positionne clairement pour le droit des Palestiniens à l'existence, à une terre, à un Etat.

En France et en Europe, depuis l'offensive militaire de Sharon, on a assisté à une recrudescence d'actes antisémites. Qu'ils soient le fait de personnes révoltées par la guerre infligée aux Palestiniens, ou simplement d'antisémites qui profiteraient du contexte, toujours est il que ces actes sont totalement étrangers à la défense de la cause palestinienne. Alors ici en Europe, comme dans le monde, il est nécessaire qu'une véritable solidarité s'exprime avec le peuple palestinien, sur la base de la reconnaissance de ses droits élémentaires. Participons nombreux aux manifestations qui soutiennent la cause du peuple palestinien.

Simone CANETTI, le 2 avril 2002

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