Jospin veut aider les patrons à faire main basse sur les retraites05/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1758.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Jospin veut aider les patrons à faire main basse sur les retraites

Selon les déclarations de Jospin, " c'est avec un gouvernement de gauche " que " les problèmes de chômage, de retraites, de santé trouveront une réponse " . Quelles réponses ? Depuis 1997 qu'il est le chef d'un gouvernement dit " de gauche " , soit près de cinq ans, on a eu le temps de voir et de juger des réponses que Jospin et ses ministres apportent à ces problèmes : le chômage frappe aujourd'hui toujours plus de deux millions de personnes. Quant aux retraites, parlons-en !

Dans son projet nommé " Présider autrement " , Jospin déclare qu'il veut favoriser " le retour à l'emploi des travailleurs de plus de 50 ans " et donner " la liberté de choix de l'âge de la cessation d'activité " , deux objectifs partagés avec Chirac là encore (qui veut " élargir la liberté de choix de l'âge de la cessation d'activité " ) ou même avec un Madelin qui propose de " mieux intégrer le travail des seniors dans l'entreprise " . Comme quoi il n'y a vraiment que des nuances de langage entre la politique proposée par les uns et par les autres, qui sont bien tous d'accord - même s'ils ne le disent que très hypocritement - pour reculer l'âge de la retraite.

Jospin écrit, toujours dans son projet, que " sécuriser nos régimes de retraite par répartition est un de (ses) engagements majeurs " . Mais pourquoi alors, son ministre de l'Economie et des Finances, Fabius, a-t-il fait passer, en février 2001, une loi visant à mettre en place " l'épargne salariale " , version française des fonds de pension et d'un système de retraites par capitalisation ? Jospin ne dit pas ouvertement qu'il faut supprimer le système des retraites par répartition, mais il affirme, tout comme le Medef et toute la droite, que ce dernier est devenu insuffisant et doit être adapté à la situation actuelle, c'est-à-dire complété par un système qu'il appelle " épargne salariale " mais qui, en fait, est une retraite complémentaire. Celle-ci, comme dans d'autres pays, prendra le pas, progressivement, sur la retraite par répartition, réduite au fil des ans à la portion congrue. Avec Jospin, les retraites par répartition représenteront peu à peu une part de moins en moins importante du montant des retraites.

Aujourd'hui, le nombre de travailleurs laissés sans emploi fait qu'il y a de moins en moins de cotisations pour abonder les caisses de retraite. Et quand les patrons embauchent, c'est le plus souvent pour des emplois précaires et mal payés, ce qui se traduit aussi par une baisse des charges sociales payées par les patrons, et donc là encore par un manque à gagner des caisses sociales. Mais évidemment, interdire les licenciements et contraindre les capitalistes à embaucher massivement, dans tous les domaines d'activités, du secteur public comme du secteur privé, ce qui serait un moyen de remplir les caisses, c'est hors de question pour Jospin. En même temps qu'il parle de capitalisation et agit pour que l'épargne salariale soit généralisée dans les entreprises, Jospin avance, tout comme Chirac, son projet d'augmentation du taux des cotisations des salariés et de recul de l'âge du départ en retraite, quand il n'a pas le culot d'expliquer que les travailleurs devraient économiser s'ils veulent se payer leur retraite.

Les retraites, les travailleurs les paient déjà eux-mêmes par leurs cotisations prélevées sur les salaires et dont Jospin et les socialistes n'excluent pas, si demain ils étaient au gouvernement, de procéder à une augmentation des taux, sous le prétexte qu'il faut alimenter les caisses. Mais les retraites par capitalisation permettraient aux secteurs financiers, avec l'épargne des salariés placée par leurs soins et gérées par les banques et autres établissements privés, de disposer de sommes colossales pour alimenter les circuits financiers. Et Jospin tout comme Chirac et les autres projettent rien moins que les aider dans cette voie.

Des experts financiers avancent le chiffre de 10 milliards d'euros qui, pour commencer, pourraient annuellement venir " accroître la dotation du fonds de réserve des retraites " . On comprend que les requins de la finance soient attirés et on comprend également la colère que cela peut déclencher parmi tous les travailleurs, quel que soit leur âge, qui s'inquiètent, à juste titre, de l'avenir que leur prépare les deux prétendants au fauteuil présidentiel.

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