Grève au CHU de Grenoble05/04/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/04/une1758.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Grève au CHU de Grenoble

Depuis le vendredi 22 mars, les médecins et le personnel du CMSF (Centre médico-social de la femme) du CHU de Grenoble sont en grève illimitée et n'assurent donc plus les 35 à 40 interruptions volontaires de grossesse qu'ils pratiquent habituellement en moyenne par semaine.

La décision de se mettre en grève n'a pas été prise à la légère. Elle constitue une étape dans une lutte engagée depuis plus de deux ans contre une décision de la direction de délocaliser le CMSF et le disperser en trois sites différents dans l'hôpital.

Les membres du CMSF pensent qu'avec ce projet, la spécificité de leur activité est menacée. En effet, tous volontaires, ils ont à coeur d'assurer la meilleure prise en charge médicale, humaine, psychologique de la femme qui désire interrompre une grossesse. Et cela commence dès la prise de contact et va bien au-delà de l'IVG.

S'ils sont intégrés au service gynécologie obstétrique, comme c'est prévu, ils craignent que les IVG ne soient pas considérées comme prioritaires et passent après le reste, si on a le temps, si on a le personnel disponible.

Le personnel du CMSF n'est pas formellement opposé à la délocalisation, s'il n'y a pas d'autres possibilités, d'autant que cette restructuration serait temporaire, en attendant la construction d'un hôpital couple-enfant, d'ici cinq ou six ans. Mais ils refusent cette délocalisation qui signifie la dissolution du centre et, afin de garantir les meilleures conditions aux femmes qui ont recours à l'IVG, ils exigent :

  • Un seul responsable médical pour l'unité ;
  • Un cadre unique responsable pour gérer le fonctionnement de l'équipe ;
  • Un personnel affecté uniquement à l'unité ;
  • Une autonomie de gestion.

    Les hommes et les femmes du CMSF, mais aussi les membres du Planning familial, ceux de la CADAC (Confédération des associations pour le droit à l'avortement et à la contraception), ou de l'ANCIC, une Association nationale des centres d'interruption de grossesse et de contraception, se battent pour que soit appliquée la loi sur l'autorisation de l'IVG et pour qu'à terme, le nombre d'IVG diminue encore. Mais sous de multiples prétextes, cette loi est sans cesse remise en cause. Lors de la nouvelle loi sur l'allongement des délais de l'IVG, M. Aubry avait fait attribuer une somme d'argent pour les centres d'IVG. Où est-elle passée ? Qui en a vu la couleur ? La ministre avait aussi promis que la pilule de la troisième génération tomberait dans le domaine public avant le deuxième semestre de l'an 2000 et donc coûterait moins cher. Ce n'est pas encore fait, et le prix de la pilule peut être dissuasif pour des jeunes qui n'ont pas beaucoup de moyens. La campagne pour la contraception prévue annuellement depuis 2000 a vaguement vu le jour en 2001. Par ailleurs, les tarifs d'une IVG n'ont pas augmenté depuis 1991. Mais les établissements privés refusent d'en pratiquer, car cela ne rapporte pas assez.

    Quant à l'interruption médicamenteuse de grossesse qu'il faudrait développer et populariser, les décrets ne sont pas encore passés au Conseil d'Etat. Un dossier-guide d'information a été réalisé, mais il n'est pas encore distribué. C'est donc au niveau même de l'État que l'application de cette loi est entravée. Mais au niveau local aussi.

    Ainsi, l'hôpital de Bourgoin (en Isère) vient de fermer son centre d'IVG car les médecins, en conflit avec la direction, viennent tous de démissionner. A la Clinique mutualiste de Grenoble, les médecins IVG viennent d'être remplacés par des médecins qui ne pratiquent pas d'IVG.

    Bien qu'en grève totale, le personnel du CMSF ne laisse pas tomber les femmes qui s'adressent à lui et s'arrange pour qu'elles soient prises en charge par d'autres centres. Mais il proteste et a déposé un référé devant le tribunal administratif car, depuis le 25 mars, la direction a assigné un médecin pour assurer un service minimum quotidien et, à partir du 2 avril, elle en assigne deux. Autrement dit, la totalité des médecins du CMSF est empêchée de faire grève.

    Le 11 avril, la responsable du " groupe national d'appui " , un groupe mis en place par le gouvernement et censé aider au fonctionnement des centres d'IVG, vient à Grenoble. Le personnel l'attend de pied ferme et a bien l'intention de se faire entendre. D'autres actions sont prévues. L'équipe du CMSF et les associations qui l'entourent sont déterminées à ce que ce centre continue d'exister et de fonctionner dans les meilleures conditions.

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