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Dans le monde
Europe de l'Energie : Ouverture à la concurrence, ouverture du capital
Depuis des années, les Etats de l'Union européenne se sont concertés pour organiser le démantèlement des services publics et en ont privatisé des pans entiers. Les nouveaux groupes privés qui remplacent les anciens services publics nationaux (ou parfois régionaux ou municipaux) se livrent à une concurrence acharnée.
Dans cette logique adoptée par les gouvernements européens, cette concurrence doit pouvoir se faire à l'échelle de l'Union européenne.
La prétendue ouverture du marché de l'électricité
L'Union européenne a décidé l'ouverture progressive du marché de l'électricité, c'est-à-dire la fin des monopoles de la fourniture d'électricité pour les plus gros consommateurs d'abord, pour tous les autres ensuite. Le processus a commencé bien avant la conférence de Barcelone. Certains pays en sont déjà au stade final, le libre accès pour tous les usagers. D'autres, comme la France, n'en sont qu'au stade de l'ouverture réservée aux gros patrons consommateurs.
La concurrence en matière de fourniture d'électricité ne signifie même pas le choix entre deux produits. Ainsi, à supposer qu'un acheteur espagnol soit intéressé par le prix d'un vendeur d'électricité danois, il est impossible que l'électricité " danoise " fasse le voyage jusqu'en Espagne. D'abord parce que c'est trop loin, et qu'avec les pertes en ligne, rien n'arriverait au bout. Ensuite parce qu'on ne va pas interrompre le trafic des lignes à haute tension des pays intermédiaires pour laisser passer les électrons danois ! En fait le client espagnol consommera le courant que lui fournira une centrale située en Espagne et le producteur danois fournira ses clients habituels. En revanche le prix facturé pourra varier selon la " loi du marché ", et donnera lieu à des jeux d'écriture entre les diverses sociétés concernées. En somme, des margoulins interposés entre la production d'électricité et le consommateur se livreront à une concurrence pour se prendre les abonnés à coups de rabais plus ou moins attractifs, comme le font déjà les entreprises téléphoniques.
Ce système compliqué nécessitera des Bourses de l'électricité, traquant les bonnes affaires (c'est ce que faisait la société Enron aux Etats- Unis), et des " autorités de régulation " chargées de veiller à maintenir quelques règles dans cette jungle concurrentielle.
Et du même coup les prévisions, et la gestion générale du marché dont s'occupaient jusqu'alors les Etats, se feront moins bien. Les patrons associés aux nouvelles entreprises privées de l'électricité se réjouissent des profits à venir. En revanche ceux qui ont été victimes des coupures en Californie ou en Espagne font grise mine.
L'ouverture du capital d'EDF en question
Chirac et Jospin, tous deux présents à Barcelone, auraient défendu la prétendue " exception française ". Ainsi Jospin a déclaré qu'il était " totalement exclu de privatiser EDF ", qu'il fallait " simplement permettre à cette entreprise de nouer les partenariats industriels dont elle a besoin ".
Tous les capitalistes, les dirigeants d'EDF et les politiciens sont d'accord sur " l'ouverture du capital " d'EDF. Jospin appelle cela " nouer des partenariats industriels ". Il s'agit d'associer des entreprises privées à l'expansion internationale d'EDF. EDF achète en effet à tour de bras tout ce qui passe à sa portée. Entreprise géante parfois qualifiée de " premier électricien mondial ", EDF a de l'argent, mais pas suffisamment pour ses ambitions, d'où l'appel aux capitaux privés, ce qui revient effectivement à une " ouverture du capital ".
Reste la question de la privatisation complète d'EDF. Jospin dit qu'il l'" exclut totalement " pour le moment. Il est évident que ni les salariés ni le grand public ne la souhaitent, et il serait particulièrement maladroit pour Jospin ou Chirac de l'annoncer maintenant, à la veille de deux échéances électorales importantes pour eux.
Mais ce qui est certain, c'est que " l'ouverture du capital ", dont le principe est acquis, prépare le terrain à une éventuelle " vraie " privatisation d'EDF. Et dès à présent, toute cette mise en scène autour de la libéralisation du marché de l'électricité vise à permettre à des capitaux privés de faire du profit en spéculant sur la livraison de l'électricité, sans avoir contribué en quoi que ce soit à créer les outils pour la fabriquer et la transporter, de permettre à des parasites de proliférer grâce à la mise à l'encan d'un service public.