Moulinex : Les patrons licencient... et l'Etat paye les indemnités !08/03/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/03/une1754.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Moulinex : Les patrons licencient... et l'Etat paye les indemnités !

Cela fait plusieurs mois que les salariés de Moulinex ont été licenciés. Mais en ce début mars, ils n'ont toujours pas touché le moindre centime de leurs indemnités de licenciement. Chargé de verser les indemnités à la place des entreprises en faillite, l'AGS (Assurance garantie des salaires), un organisme dont le Medef tire les ficelles, a fait savoir qu'il n'entendait rien débourser. Selon l'AGS, ou plus exactement selon le Medef, ce serait au gouvernement de payer ces indemnités puisqu'il a fait la promesse de les augmenter à l'automne dernier. On sait qu'en novembre dernier, Seb avait repris le groupe électroménager Moulinex, alors en dépôt de bilan. Ce rachat proposait de licencier 3 744 personnes, soit les deux tiers des effectifs de Moulinex en France, tout en fermant les usines de Basse-

Normandie. Dans cette région, Moulinex était l'un des premiers employeurs privés. Voilà ce que le gouvernement osait présenter comme une solution ! Cette proposition provoqua la colère des travailleurs car elle signifiait la perte de leurs salaires, voire même de leurs maisons s'ils ne retrouvaient pas rapidement un emploi. La colère était d'autant plus justifiée que les indemnités légales proposées étaient plutôt dérisoires : un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté soit 12 000 F (1830 E) pour dix ans d'ancienneté et 36 000 F (5 488 E) pour trente ans ! Face à la mobilisation des salariés de Moulinex, patronat et gouvernement accordèrent un indemnité supplémentaire de 80 000 F (12 196 E) aux seuls salariés ayant plus de vingt-cinq ans d'ancienneté - ce qui ne représente pas grand-chose - et de seulement 30 000 F pour tous ceux qui en avaient moins de dix. Au regard de la richesse accumulée par les actionnaires de Moulinex, c'était vraiment peu, mais même cela, jusqu'à présent, n'a pas été versé aux travailleurs.

Pendant des décennies, le groupe électroménager Moulinex a réalisé des milliards de profits grâce au travail des salariés, profits qui se sont retrouvés aussitôt sur les comptes privés des actionnaires. Ces derniers empochèrent subventions, aides à l'emploi, bénéficiant de tous les dégrèvements fiscaux, en provenance de la Région comme de l'Etat. Puis, lorsqu'ils jugèrent l'entreprise non performante selon leurs critères de rentabilité, ils mirent la clef sous la porte sans autre forme de procès, jetant ainsi à la rue des milliers d'ouvriers et d'ouvrières, poussant à la ruine économique des régions entières.

Quant aux repreneurs qui se succédèrent à la tête de l'entreprise, ils lanternèrent les salariés, avec la complicité des syndicats, sur une éventuelle reprise de Moulinex. Et avant leur départ, les dirigeants s'accordèrent de substantielles indemnités !

Aujourd'hui, le gouvernement Jospin refuse d'imposer aux richissimes actionnaires responsables des licenciements le paiement de cette indemnité, qui pourtant ne ferait qu'égratigner leurs immenses fortunes. En toute logique, le gouvernement devrait réclamer le remboursement de toutes les subventions régionales et gouvernementales touchées par les actionnaires de Moulinex ; ce qu'il refuse également de faire, préférant voler au secours du patronat. Le ministre de l'Economie et des Finances, Laurent Fabius, a récemment assuré que les fonds devraient désormais être débloqués pour les salariés de Moulinex ! Voilà la logique d'un système économique où les patrons qui se sont enrichis en pillant le travail des salariés ne sont jamais tenus pour responsables des dégâts sociaux qu'ils provoquent.

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