Seine-Saint-Denis : Education au rabais pour les enfants d'immigrés01/02/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/02/une-1749.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Seine-Saint-Denis : Education au rabais pour les enfants d'immigrés

Chaque année, près de 30 000 enfants arrivent en France pour y rejoindre leurs parents, immigrés des pays pauvres d'Afrique, d'Asie ou d'Amérique latine. La plupart de ces enfants ne connaissent pas le français, et une bonne partie d'entre eux ne sont même jamais allés à l'école dans leur pays. Les classes prévues pour leur apprendre le français restent en nombre dramatiquement insuffisant, bien que le problème soit connu depuis des années. Les autorités proclament que le " droit à l'éducation " est garanti à tous les enfants, mais agissent de telle sorte que celui-ci se transforme bien souvent en droit à l'échec scolaire.

Cette année, en Seine-Saint-Denis, les classes d'accueil en collège, où ces enfants, entre 11 et 16 ans, sont censés apprendre le français avec des enseignants spécialisés, sont au nombre d'une cinquantaine. Elles étaient pleines dès fin septembre rien qu'avec les élèves arrivés avant cette date. Depuis, les enfants continuent d'affluer. La plupart ont dû attendre chez eux plusieurs mois la lettre de l'Inspection académique leur disant où aller. Ce qui posait de nombreux problèmes matériels à leurs parents.

En janvier, l'Inspection académique s'est enfin décidée à faire un geste, mais un geste dérisoire. Quatre collèges du département, à Saint-Denis, à La Courneuve, à Pantin et à Bagnolet, vont accueillir un " module " où une vingtaine d'élèves pourront apprendre le français trois après-midi par semaine. Le reste du temps, ils seront scolarisés dans le collège le plus proche de chez eux, où ils suivront des cours dans une langue qu'ils ne comprennent pas.

Selon l'inspecteur, cela permettrait un " bain linguistique " ! Et imposer à ces enfants qui viennent juste d'arriver en France des trajets auxquels n'est astreint aucun autre collégien. Les élèves en " module " à Saint-Denis, par exemple, viendront de tous les collèges de cette ville, mais aussi d'Epinay, Saint-Ouen ou Pierrefitte. Et ils devront se mettre au niveau rapidement car les règles veulent qu'on ne puisse passer plus d'un an en classe d'accueil. Il faut bien faire de la place pour les nouveaux ! Et même ce dispositif est loin de permettre de scolariser tous les élèves qui devraient l'être actuellement, sans parler de ceux qui vont encore arriver.

Pour justifier son refus de créer de vraies classes d'accueil en nombre suffisant, l'Inspection académique n'avance pas que des arguments budgétaires. Elle explique que cela créerait un " appel d'air " qui attirerait d'autres enfants dans la même situation en Seine-Saint-Denis. A l'en croire, si les enfants y étaient trop bien accueillis, certains risqueraient de venir de Paris par exemple pour s'y faire inscrire sous une fausse adresse. Il est difficile d'être plus hypocrite ! Si ces enfants viennent en Seine-Saint-Denis, c'est simplement parce que leur famille y habite déjà. En refusant de les scolariser décemment, les responsables de l'Education nationale prennent la responsabilité de développer les ghettos, au niveau des établissements scolaires comme dans les cités...

Il y aurait pourtant un moyen simple d'éviter cet appel d'air, un tout petit courant d'air, soit dit en passant. Ce serait de mettre en place partout, et avec des places correspondant aux besoins réels, des classes d'accueil, avec des enseignants en nombre.

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