Prisonniers au nom de la " liberté immuable "01/02/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/02/une-1749.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Prisonniers au nom de la " liberté immuable "

Les autorités militaires américaines ont laissé complaisamment filmer les prisonniers en provenance d'Afghanistan dans leur base cubaine de Guantanamo.

On les a donc vus enchaînés, yeux bandés, à genoux devant leurs gardiens, dans des enclos grillagés, et revêtus de tenue orange aux cas où, malgré ce luxe de précautions, ils parviendraient à s'enfuir. On les a rasés, pour des raisons hygiéniques dit-on (les militaires américains ignorent l'existence de la douche ?). Et on les exhibe dans une attitude qui se veut humiliante, aux pieds de leurs vainqueurs.

Devant les critiques qui arrivent de toute part à la vue de ce tableau, les dirigeants américains prétendent que leurs prisonniers " reçoivent un traitement humain, conforme aux principes de la convention de Genève ", laquelle convention est censée régir les droits des prisonniers de guerre.

Mais il n'y a pas eu de guerre, du moins pas de guerre déclarée entre les Etats-Unis et l'Afghanistan. Aucune règle du droit n'a couvert les bombardements par les B52, ni le renversement du régime des talibans, ni la capture et l'enlèvement des prisonniers. Les Etats-Unis ont fait ce qu'ils voulaient, au seul motif qu'ils sont les plus forts.

Et le porte-parole de la Maison-Blanche, légèrement embarrassé, a déclaré que " les règlements contenus dans la convention de Genève doivent être interprétés de manière moderne ".

C'est en effet très moderne de forcer les prisonniers à s'agenouiller aux pieds des vainqueurs : on voit de telles scènes gravées dès la plus haute antiquité !

Des ONG protestent, des gouvernements (de France, de Grande-Bretagne) réclament du bout des lèvres le droit de juger à domicile leurs propres ressortissants, mais les dirigeants américains n'en ont cure.

Faute de pouvoir présenter à leurs téléspectateurs Ben Laden et le mollah Omar, introuvables, ils leur jettent en pâture les prisonniers capturés en Afghanistan. Et comme ces mêmes dirigeants ont de la religion, ils ont accordé aux détenus des exemplaires du Coran... en anglais ! Au cas où des messages codés se seraient glissés parmi les sourates en arabe ?

Les talibans n'étaient certes pas très avancés en matière de civilisation, c'est le moins qu'on puisse dire. Ils s'appuyaient sur un régime particulièrement obscurantiste et réactionnaire. On peut seulement invoquer, à leur décharge, qu'ils vivaient dans un des pays les plus misérables du monde.

Tandis que leurs vainqueurs, qui représentent la première puissance de la planète, n'ont l'excuse ni de la misère, ni de l'ignorance pour manifester autant de barbarie que les vaincus.

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