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Dans le monde
Palestine : Une population étranglée et acculée au désespoir
"Deux des trois millions de Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza vivent en dessous du seuil de pauvreté" écrivait récemment la correspondante en Palestine du journal israélien Haaretz.
Cela, bien peu de journalistes l'ont rappelé, alors qu'ils se flattent d'éclairer l'opinion sur la situation en Palestine. C'est pourtant dans l'oppression de tout un peuple - celui des Arabes palestiniens - que réside la raison principale de ce que certains nomment "spirale de la violence" : comme s'il s'agissait d'un phénomène venu de nulle part, et comme si les premières victimes de cette violence n'étaient pas les Palestiniens !
La seconde intifada
Décompter les victimes de part et d'autre relève d'une sinistre arithmétique. Il n'en reste pas moins que, sur un millier de morts depuis qu'a éclaté la seconde Intifada en septembre 2000, 80 % des victimes sont palestiniennes. Et il ne peut pas en être autrement quand, aux pierres et aux bombes artisanales des désespérés, l'État israélien oppose son armée super-équipée, de loin la plus puissante de toutes celles de la région. Et cela pour ne rien dire des provocations quotidiennes dont sont victimes les Palestiniens, en Cisjordanie et à Gaza même, de la part de colons d'extrême droite, racistes et armés jusqu'aux dents, qui savent qu'au moindre affrontement l'armée israélienne viendra à leur rescousse.
Il y a un peu plus d'un an, le leader de la droite, Sharon, avait délibérement provoqué la colère palestinienne - la seconde Intifada - en paradant sur l'Esplanade des Mosquées, dans la partie arabe de Jérusalem. Le gouvernement du travailliste Barak lui avait emboîté le pas en lançant une répression qui fit des dizaines de morts palestiniens en quelques jours. Propulsé par cette escalade guerrière, Sharon allait bientôt remplacer Barak comme Premier ministre et lançait aux militaires : "Ne parlez pas, agissez, chaque jour".
Le résultat est là. C'est tous les jours ou presque que des Palestiniens tombent sous les balles des colons et de l'armée d'Israël, que celle-ci investit telle ou telle portion de ce qu'on appelle par dérision Territoire "autonome" de l'Autorité palestinienne. Dans ce territoire, il n'y a plus guère de ville, de village où l'on ne voie des maisons calcinées, des champs labourés par les chars, des vergers aux arbres déracinés par les soldats ou les colons d'extrême droite israéliens.
Les ghettos de la misère
Le "bouclage" répété de la Cisjordanie et de Gaza par l'armée israélienne les a transformés en ghettos de plus en plus misérables dont les habitants sont à la merci des forces d'occupation.
En plus de trente ans d'occupation israélienne, nombre de paysans palestiniens ont été spoliés de leurs terres, les meilleures étant accaparées par les colonies israéliennes qui n'ont cessé, sous des gouvernements de droite comme de gauche, de s'étendre. Faute de pouvoir désormais travailler sur place, beaucoup de Palestiniens ne survivent que comme main-d'oeuvre surexploitée en Israël même. Du coup, le "bouclage" des territoires palestiniens les condamne à la faim et à la misère. Quant aux rares entreprises locales, elles aussi sont étranglées : le blocus les empêche d'exporter leur production, leurs employés ne peuvent plus venir travailler, bloqués qu'ils sont aux barrages militaires israéliens qui hérissent le pourtour des zones "autonomes".
Dès l'instauration de l'Autorité palestinienne, en 1995, et tout en faisant mine de prendre leur parti de la création à venir d'un État palestinien indépendant, les autorités israéliennes se sont employées à rendre la vie quotidienne insupportable à la population. Gaza et la Cisjordanie, occupés mais jusqu'alors chacun d'un seul tenant, ont été morcelés en îlots entourés d'un "cordon sanitaire" militaire qu'il est impossible de franchir (pour aller travailler, étudier, rendre visite à des parents) sans disposer d'un "permis" soumis à l'arbitraire de l'occupant.
En quelques années de ce régime depuis les "accords de paix" d'Oslo, le niveau de vie des Palestiniens a été divisé par trois ou quatre, le chômage a frappé 60 % de la population. Et quand l'expédition de Sharon sur l'Esplanade des Mosquées a déclenché la colère de ceux qui se voyaient dépouiller de tout, la violence de l'État israélien s'est déchaînée.
Mais cette violence-là n'est que l'aspect le plus visible de celle, multiforme, que subit la population palestinienne depuis des décennies, avec la bénédiction hypocrite, sinon l'aide active de puissances impérialistes qui s'appuient sur Israël pour maintenir leur ordre au Proche-Orient.
Car il faut tout de même rappeler que, depuis plus d'un demi-siècle et au fil de guerres à répétition, plusieurs millions de Palestiniens ont été chassés de chez eux et poussés à l'exil, et que ceux qui sont restés sur place ont été transformés en parias sur leur propre terre.