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L'assassinat de Maurice Audin
Si Aussaresses ne cache rien du sort qu'il fit subir à Ben M'Hidi, il est moins bavard jusqu'à présent quand il s'agit de la mort de Maurice Audin.
Celui-ci, âgé de 25 ans en 1957, assistant à la faculté des sciences à Alger, était marié et père de trois enfants. Il appartenait aussi au Parti Communiste Algérien, interdit en cette période où les paras français réprimaient les nationalistes algériens. Les militants actifs du PCA étaient également traqués par l'armée. Audin avait hébergé chez lui un de ces militants en avril 1957. Le 11 juin, à 11 heures du soir, les paras firent irruption chez lui. Certains d'entre eux s'installèrent dans l'appartement durant six jours, où ils séquestrèrent sa femme, Josette. Maurice Audin fut emmené dans un centre de détention. Sa femme et ses enfants ne le revirent jamais.
Maurice Audin fut torturé, selon des procédés qu'Henri Alleg, autre militant du PCA arrêté le lendemain, a décrit dans son livre-témoignage, La Question : attaché à une porte posée à même le sol, Audin subit le supplice de l'électricité et de l'eau. Entre ses périodes d'" interrogatoires ", il fut confronté à ses camarades communistes codétenus : Alleg et le docteur Hadjadj. Ils se revirent pour la dernière fois le 18 juin, lors d'un transfert dans une autre prison. Le jeune homme put alors raconter ce qu'on lui avait infligé.
C'est sans doute le 20 juin 1957 qu'Audin fut tué par ses tortionnaires. Pour eux, cette mort relevait de la routine, mais Audin était un Européen, enseignant à l'université, dont la femme ne cessa pas, dès qu'elle put sortir de chez elle, d'alerter le plus de monde possible, responsables universitaires, syndicaux, judiciaires et politiques. Des centaines de personnes se mobilisèrent pour exiger sa libération.
Les paras inventèrent donc un scénario d'évasion, truffé d'invraisemblances et de contradictions. Le jeune homme exsangue qu'Alleg avait croisé le 18 juin fut soudain transformé en un jeune homme en pleine forme capable de sauter d'une jeep militaire et de disparaître dans la foule en courant... Ces contradictions furent dénoncées, dès 1958, par Pierre Vidal-Naquet dans son livre L'Affaire Audin.
Mais Aussaresses, qui est pourtant celui qui a commandé l'arrestation, s'en tient encore aujourd'hui aux bobards des militaires : " Audin disparut le 21 juin. Cette disparition fit scandale et donna lieu à une enquête très poussée. "
L'instruction judiciaire d'alors s'était noyée dans les sables. Et c'est bien le même sort qui semble guetter la nouvelle plainte de Josette Audin, déposée après la parution du livre du général tortionnaire.
Mais le fait demeure, un militant communiste, Maurice Audin, a bel et bien trouvé la mort entre les mains des paras, dans le cadre de la politique de répression commandée par les dirigeants français d'alors pour conserver, coûte que coûte, leur colonie algérienne.