A Toulouse, 2 mois après l'explosion d'AZF : Toujours pas de fenêtres dans les quartiers populaires !23/11/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/11/une-1740.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Leur société

A Toulouse, 2 mois après l'explosion d'AZF : Toujours pas de fenêtres dans les quartiers populaires !

À Toulouse, malgré les promesses avec effets d'annonce, les engagements des élus du PS, les coups de téléphone qu'ils auraient donnés à Jospin, les discours compatissants, près de deux mois après la catastrophe AZF, 10 000 à 12 000 familles continuent à vivre dans des appartements dévastés, avec des fenêtres arrachées, des cloisons tombées, des toits envolés. Pour être entendu des pouvoirs publics (mairie, Conseils régional et général, préfecture), il est clair qu'il vaut mieux être directeur de clinique privée et habiter place du Capitole, que pauvre et habitant la cité populaire du Mirail.

Poussés par la mobilisation des sinistrés et la pression médiatique, les pouvoirs publics (mairie, département, région et préfecture) n'ont d'autres réponses que de proposer du "provisoire durable", ce qui est un aveu éloquent sur les délais qu'ils prévoient pour les travaux définitifs. Mais colmater les fenêtres avec du contreplaqué ou du plexiglas, c'est s'installer durablement dans une situation insupportable. Il suffit d'interroger les médecins des quartiers sinistrés pour en mesurer les conséquences directes sur la santé.

Les pouvoirs publics persistent dans une logique qui a fait faillite. Ils laissent toujours jouer la loi de l'offre et de la demande ; faire des papiers d'abord, et les travaux ensuite. Alors que ce qu'il faudrait, c'est une loi d'urgence absolue qui permette d'inverser l'ordre : d'abord les travaux, et ensuite le remboursement par TotalFinaElf.

Du côté de l'État, le sous-préfet à la ville a répondu aux sinistrés qui réclament que l'État avance les fonds nécessaires au démarrage immédiat des travaux : "Ce n'est pas le rôle de l'État, ça ne s'est jamais fait et il ne sait pas le faire" (cité dans la Dépêche du Midi du 13/11/2001). Il ne sait pas le faire ? Voilà autre chose ! Ça dépend pour qui ! Quand il s'agit d'ouvrir la bourse de l'État aux patrons et aux riches, là, l'État des Jospin et autres Juppé est vraiment dans son rôle. Mais pour les pauvres, il ne sait pas. En réalité, c'est un aveu.

Poussé par les événements, le secrétariat d'État au Logement a annoncé quelques mesures. Toutes sont le résultat de négociations "à l'amiable" avec TotalFinaElf. Le groupe pétrolier s'engage à faire financer par ses assurances les travaux de "mise hors air et hors eau". Deux mois après la catastrophe ! Et à payer aussi les surcoûts de gaz et d'électricité. C'est bien la moindre des choses ! Enfin l'Etat s'engage à financer "40 % de la différence de coût constatée entre les travaux réels et le remboursement pour les revenus les plus modestes". Ahurissant : l'Etat sait déjà que TotalFinaElf ne paiera pas tout. Loin d'exiger par une loi qu'il rembourse jusqu'au dernier centime, l'Etat accepte de payer 40 % pour les revenus les plus modestes, et donc d'en laisser 60 % à la charge de ces sinistrés "les plus modestes", et d'en laisser la totalité aux autres !

Du côté de la mairie, lors du Conseil municipal du 19 novembre, le représentant des "sans-fenêtres" comme on les appelle maintenant, a demandé au maire Douste-Blazy combien la mairie mettait sur la table pour faire l'avance financière nécessaire au début des travaux, en signalant qu'il demanderait la même chose aux autres pouvoirs locaux, puisque ceux-ci n'avaient pas jugé utile d'agir de manière concertée pour régler le problème dans l'urgence. Il lui a répondu qu'il n'arrêtait pas de demander à la préfecture d'agir, mais n'a rien dit de sa contribution financière. D'ailleurs depuis le début, chacun se renvoie la "patate chaude", en étalant des préoccupations bassement politiciennes. La seule chose qu'ils ont réussi à mettre en place est une "cellule de travaux", avec la mission de faciliter le démarrage des travaux. Mais son rôle se limitera à détecter les dysfonctionnements. Ce n'est en rien ce que demandaient les sinistrés, puisque cette cellule de travaux n'est dotée d'aucun moyen exceptionnel, financier ou matériel. Elle permet simplement aux sinistrés victimes de dysfonctionnements... de les faire savoir en téléphonant. Dans le temps, pour ne pas régler un problème, le pouvoir créait une "commission". Maintenant on crée des "cellules".

Les sinistrés entendent bien ne pas se contenter de ces "mesurettes". Après leur rassemblement réussi du 11 novembre, ils avaient organisé le 14 novembre une journée de protestation, qui avait commencé au Mirail par une manifestation des familles, à une centaine de personnes, pour se retrouver devant la mairie, puis devant la préfecture à près de 400. Le 21 novembre, deux mois jour pour jour après l'explosion d'AZF, ils devaient de nouveau se retrouver pour manifester leur colère, en occupant un pont sur la rocade.

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