Saint Frères(80) : On licencie pour augmenter les bénéfices23/11/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/11/une-1740.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Saint Frères(80) : On licencie pour augmenter les bénéfices

L'entreprise Rosenlew- Saint Frères de Beauval dans la Somme, qui fabrique des sacs et emballages plastiques, a annoncé le licenciement de 98 de ses 267 ouvriers d'ici les fêtes de Noël. Il s'agit d'une étape supplémentaire vers la fermeture complète de l'usine.

Dans les années soixante, plus de 700 ouvriers travaillaient encore pour les entreprises Saint Frères de la région. Depuis, les plans de licenciements se sont succédé, éprouvant très durement une région largement orientée vers l'industrie textile. Ce nouveau plan est un coup dur pour les salariés : beaucoup travaillent dans l'usine depuis l'âge de 14 ou 16 ans, ils y ont passé plus de 30 ans, pour un salaire dépassant à peine le Smic.

Aujourd'hui, la direction propose royalement 5 000 F à ceux qui prendraient leur compte ! Pour les autres, la seule perspective est pour l'instant de partir avec la prime légale de la convention du textile équivalant à un huitième de mois de salaire par année d'ancienneté, soit par exemple, pour 22 ans d'ancienneté, 34 000 F. Cela ne fait évidemment pas le compte pour les salariés qui, travaillant souvent à plusieurs de la même famille dans l'entreprise, vont se retrouver sans aucun revenu, avec pour beaucoup des crédits, en particulier sur une maison.

Les salariés, en grève la semaine du 15 novembre, réclament une prime de licenciement de 200 000 F pour tous, ainsi qu'un mois de salaire par année d'ancienneté.

Depuis l'implantation des usines Saint Frères en 1889, les frères Saint, patrons paternalistes qui géraient la vie de leurs salariés de la maternité aux logements, puis différents gros actionnaires ont accumulé des profits en exploitant des générations d'ouvriers de la région. Ils se sont fait construire des châteaux, comme celui de Flixecourt et bien d'autres ailleurs. Ils ont pour certains, avant de faire un dépôt de bilan, placé leurs profits dans d'autres entreprises et sur de multiples comptes en banque.

C'est la multinationale finlandaise UPM qui a racheté, il y a quelques années, l'usine de Beauval. Spécialisée dans la fabrication du papier, elle possède des usines sur les cinq continents. Dans son rapport sur l'année 2000, destiné à ses actionnaires, elle affirme que cette année les profits ont connu un nouveau record, enregistrant le meilleur score depuis cinquante ans que l'entreprise existe. Grâce à ces profits, elle a racheté pour des sommes énormes une série d'entreprises : en moins de deux ans, elle a absorbé les entreprises américaines Rexam et Repap, une unité de fabrication chinoise et l'usine allemande Haindl en mai 2001, une entreprise dont la valeur est estimée la bagatelle de 24 millions de francs. Pas trop mal, pour une entreprise soi-disant obligée de licencier à cause de difficultés financières ! Et, après toutes ces acquisitions qui les ont enrichis, les actionnaires ont tout de même trouvé le moyen de se partager encore de coquets bénéfices.

Le montant total des primes de licenciement en plus des faibles indemnités légales, réclamées par les salariés ne représente même pas 0,9 % de ce montant !

Et c'est sans gêne que la direction a accepté, à l'issue d'une entrevue au ministère de l'Industrie avec le député socialiste local, une subvention du gouvernement pour le plan de licenciement. De l'argent -celui de nos impôts- pour mettre à la rue les salariés !

Les salariés ne sont pas dupes. En grève, ils ont bloqué les portes de l'usine et organisé des opérations escargot sur la nationale. La manifestation locale à laquelle ils ont appelé a rassemblé plus de 700 personnes. Une nouvelle manifestation est prévue.

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