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Moulinex : Actionnaires et PDG ne sont pas sur la paille
Globalement, la prime touchée par les licenciés de Moulinex, ce que les commentateurs ont osé appeler une "surprime", représenterait 189 millions de francs, répartis entre plusieurs milliers d'ouvriers, pour solde de tout compte. Mais rien qu'en 1998, la direction de Moulinex déclarait 203 millions de bénéfices et 250 millions en 1999 à partager entre les actionnaires, dont quelques-uns disposent d'un gros paquet d'actions. Après la fusion Moulinex-Brandt, en 2001, le nouveau groupe a déclaré un déficit de 853 millions de francs. Mais le 30 décembre 2000, à la veille de la fusion, les propriétaires de Brandt ont versé 785 millions de francs aux actionnaires, quatre fois plus que la prime des licenciés de Moulinex.
Le destin des anciens PDG et actionnaires de Moulinex ressemble lui aussi à un conte de fées. Pour eux, s'entend ! Entre 1994 et 1997, un financier, ex-collaborateur de Pierre Bérégovoy, Jean-Charles Naouri, devient le principal actionnaire de Moulinex. Il annonce qu'il veut atteindre en trois ans une rentabilité des capitaux de 20 %, à la place de 7 %. Un premier plan de suppression de 1 100 emplois a lieu en 1994. Quand Jean-Charles Naouri part en 1997, il a empoché la coquette somme de 160 millions de francs et laissé sur le carreau plusieurs milliers de travailleurs. Naouri est aujourd'hui à la tête de Casino Groupe, administrateur des AGF, de Facom, des CCF. Il avouait en 2000 un salaire de 2,2 millions de francs par an, hors stock-options.
Georges Soros, autre prédateur de haut vol, spéculateur mondialement connu, a fait lui aussi un passage profitable par Moulinex. Alain Minc était lui aussi administrateur de Moulinex jusqu'en 1997, et n'a pas à s'en plaindre. Il est aujourd'hui, entre autres, administrateur de Valeo, au conseil de surveillance de Pinault-Printemps-La Redoute et président du conseil de surveillance du journal Le Monde.
Pierre Blayau, ex-PDG de Moulinex après avoir entre 1997 et 2000 fermé plusieurs usines, s'est brillamment reconverti : il est PDG de Géodis, administrateur de Fimalac, la même société financière que Naouri. Il vient d'annoncer aux salariés de Géodis, le numéro un du transport en France, un "plan de restructuration douloureux".
Enfin, le dernier PDG du groupe Moulinex-Brandt, Patrick Puy, n'a pas non plus rejoint le cortège des chômeurs. Après avoir déposé le bilan de Moulinex-Brandt et organisé son rachat par SEB, il est devenu... vice-président de SEB. Il faut dire que la famille Lescure, qui possède SEB, peut le remercier. Elle a fait une sacrée opération : elle récupère les deux tiers des activités de Moulinex, mais seulement un tiers des salariés et beaucoup d'avantages fiscaux. Elle vient d'annoncer une hausse de 15 % de son bénéfice.
Seuls les salariés sont donc les laissés-pour-compte de la "saga" Moulinex. Leur travail a pendant plusieurs dizaines d'années engraissé des requins qui vont aujourd'hui se nourrir ailleurs.