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Leur société
Stock-options
Selon une enquête de l'Expansion, la France est championne d'Europe en matière de stock-options. Avec 22 milliards de francs, elle domine "le paysage européen", y compris le Royaume-Uni. Ce dernier pays arrive en seconde position avec 21,1 milliards de francs, loin devant les Pays-Bas (7,5 milliards) ou l'Italie (2,2 milliards). Et encore, ces chiffres ne concernent que la plus-value potentielle sur les stock-options distribuées par les cinq premières entreprises de chaque pays !
une machine à fabriquer des millionnaires
Rappelons que le système des stock-options vient des Etats-Unis et s'est rapidement propagé en Europe. Il permet aux grandes entreprises de distribuer à leurs dirigeants et cadres des revenus supplémentaires. Son fonctionnement est simple : une société offre une partie de ses actions à ses dirigeants en récompense de leurs bons et loyaux services. En France, nombre de grands groupes industriels, de la pharmacie à l'énergie, pratiquent ce système ; d'ailleurs sept grandes entreprises françaises se situent parmi les dix premiers groupes européens les plus généreux pour leurs cadres.
L'affaire devient vraiment juteuse pour ces derniers, lorsque, au bout de quelques années, ils choisissent de revendre leurs stock-options quand le cours a grimpé et est largement supérieur à celui en vigueur au moment de leur attribution. Ainsi les heureux détenteurs de ces actions peuvent-ils empocher des millions de francs chacun et s'enrichir sans avoir rien fait qu'attendre que l'opportunité se présente ! Aventis consacre 4,1 % de son capital aux stock-options et fait bénéficier de 6,14 milliards de francs de plus-value potentielle une toute petite partie de son personnel d'encadrement. Même ordre de grandeur chez TotalFinaElf où seulement 2,2 % du personnel peut se partager 5,49 milliards de francs de plus-value potentielle.
A en croire les partisans de ce système, les stock-options récompenseraient "l'effort" et "la compétence" des dirigeants afin de les intéresser aux résultats de leur propre entreprise. Ce n'est même pas le cas même si on prend les critères qui ont cours dans ces milieux. Les dirigeants les mieux lotis sont bien loin d'être les plus "performants". Les dirigeants d'Aventis, de Vivendi, d'Axa qui empochent les plus grosses plus-values sont à la traîne derrière, question performance. Soixante-huit mille, tel est le nombre de dirigeants et de cadres qui se partagent, aujourd'hui le gâteau des stock-options ; et ce chiffre a doublé entre 1999 et 2000.
La récente chute de la Bourse a fait fondre en grande partie cette plus-value potentielle, qui de toute façon ne se réalise qu'au moment de la revente des stock-options. Mais la machine à fabriquer des cadres dirigeants millionnaires continue tout de même à fonctionner et a de beaux jours devant elle. Ainsi le groupe Alcatel est passé, en l'espace d'un an, toujours selon l'Expansion, "du statut de champion français des stock-options (15 millions de francs de plus-values potentielles) au vingt-et-unième rang, avec à peine plus d'un demi-milliard d'espérance de gains à offrir à ses cadres". Le groupe Nokia, qui licencie à tour de bras, aujourd'hui, en prétextant les difficultés du secteur de la téléphonie mobile, a vu son magot divisé par six à cause de la chute des cours de la Bourse. Mais il possède encore près de 11 milliards de francs à distribuer à ses cadres ! Certes, le même journal ajoute que "la baisse de la Bourse a ramené la plus-value potentielle globale des grandes entreprises françaises de 84 à 48 milliards de francs" ; mais la fraction des PDG et des hauts cadres qui dirigent ces sociétés ne sont pas pour autant sur la paille. Car ces pertes virtuelles restent très relatives et elles risquent fort de se transformer en profits bien réels lors d'une prochaine hausse. D'ailleurs, on a vu les gains réalisés par un certain nombre de patrons l'année dernière lorsque les cours de la Bourse étaient au plus haut : Thierry Desmarets, le PDG de TotalElfFina a vendu 5 000 stock-options en 2000 ; une vente qui lui a rapporté la bagatelle de 3,2 millions de francs ; ce qui n'est évidemment rien à côté des 96 millions de francs que se sont partagés les onze dirigeants du groupe Lagardère à la même époque.