Soudan : Les risettes des états-unis à la dictature islamiste21/09/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/09/une-1731.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans le monde

Soudan : Les risettes des états-unis à la dictature islamiste

Au moment même où les dirigeants américains désignent du doigt les régimes intégristes islamistes, ils ont, début septembre, renoué discrètement des relations avec l'un d'eux : la dictature qui sévit à Khartoum, au Soudan. Il faut dire qu'on y trouve d'importants gisements de pétrole.

En mai dernier, lors d'une tournée africaine, le secrétaire d'Etat Colin Powell a annoncé une aide "humanitaire" au gouvernement islamiste du Soudan. Et le 6 septembre, les Etats-Unis ont désigné un émissaire spécial, ce dont s'est félicité le gouvernement soudanais. Officiellement, l'ancien sénateur américain chargé de cette mission doit proposer ses bons offices pour mettre fin à la guerre entre le gouvernement musulman et la rébellion chrétienne du Sud qui ensanglante le pays depuis 1983.

Ces dernières années les Etats-Unis boycottaient le gouvernement soudanais et finançaient la rébellion du Sud. En août 1998, à la suite des attentats contre les ambassades américaines de Nairobi et Dar-es-Salaam, imputés à des terroristes en relation avec les gouvernements soudanais et afghan, Clinton, le prédécesseur démocrate de Bush, avait fait bombarder une fabrique de médicaments des environs de Khartoum, qu'il avait présentée comme une usine d'armes chimiques. Et l'ONU avait pris des sanctions contre le Soudan, restées en vigueur jusqu'à ce jour, aggravant ainsi la famine qui y sévit.

Ce changement de politique des Etats-Unis à l'égard du Soudan est peut-être lié au remplacement de l'équipe de Clinton par celle de Bush. Mais plus sûrement il sent le pétrole à plein nez. Depuis août 1999 en effet, le Soudan en est devenu exportateur et d'importantes réserves ont été détectées.

Cette découverte est pour la population soudanaise source de nouvelles souffrances. Plusieurs rapports dénoncent les bombardements dont sont victimes les habitants des zones pétrolières. Selon un document officiel canadien, "la région de Pariang a été attaquée en mai 1999 et les villages complètement incendiés (...). On a ainsi dégagé une bande de territoire de 100 kilomètres autour des gisements de pétrole (...). Dans le comté de Ruweng, on ne peut guère nier que l'exode soit causé par l'activité pétrolière. Il est clair comme de l'eau de roche que la politique du gouvernement du Soudan a un caractère de génocide axé sur l'élimination de la population du Haut-Nil occidental, de manière à ce que le gouvernement du Soudan puisse exploiter le pétrole sans résistance".

Si le gouvernement soudanais compte bien entendu récolter quelques royalties, l'essentiel des bénéfices ira aux compagnies pétrolières. Certaines compagnies éludent leurs responsabilités dans le massacre de la population en s'abritant derrière des sociétés écrans. C'est une pratique avérée pour British Petroleum (BP) qui intervient au Soudan par l'intermédiaire d'une société chinoise. Une trentaine de sociétés, parmi lesquelles de simples prête-noms des grandes compagnies, ont négocié avec le gouvernement soudanais, alléchées par d'importantes réserves à un coût de production très bas. Le pactole semble si intéressant que certains dirigeants américains se seraient inquiétés que la politique menée jusque-là par les Etats-Unis à l'encontre du gouvernement soudanais risquait de nuire aux sociétés pétrolières américaines par rapport à leurs concurrentes.

Mais que les relations entre les Etats-Unis et le régime islamiste de Khartoum soient mauvaises ou bonnes, cela risque de ne pas changer grand-chose pour la grande majorité de la population du Soudan victime de l'impérialisme américain comme d'autres peuples d'Afrique le sont de l'impérialisme français. C'est bien l'ordre impérialiste qu'il est nécessaire de renverser.

Jean SANDAY

Qui était massoud ?

Bien des médias éplorés, et des représentants du monde politique également, comme Nicole Fontaine, la présidente du Parlement européen, mais aussi bien d'autres, ont pleuré au nom des libertés le commandant Massoud, assassiné le 9 septembre par un commando intégriste.

C'est oublier bien vite qui il était : Massoud, fils d'un colonel de l'armée du roi afghan, fit des études au lycée français de Kaboul, et était ingénieur en génie civil. Pionnier des mouvements islamiques de lutte contre l'intervention soviétique en Afghanistan, il fut ministre de la Défense du premier gouvernement mis en place par les moudjahidin, en 1992. C'est à ce titre d'ailleurs que, lors d'un épisode des luttes fratricides à l'intérieur de ce gouvernement, il fit bombarder le quartier chiite de Kaboul, faisant des milliers de morts. C'était un fervent pratiquant qui, dans son fief du Panshir, faisait porter aux femmes la burqa, le voile grillagé, et exigeait d'elles, comme de sa femme, la réclusion. Sans l'intervention d'un comité suédois pour l'Afghanistan, les écoles de filles y auraient été supprimées, comme dans le reste du pays.

Oui, Massoud combattait le régime des taliban. Avec lui a disparu quelqu'un qui pouvait fournir une solution de rechange crédible et reconnue aux taliban, un homme politique de recours pour l'impérialisme ; mais en aucun cas un défenseur de la liberté, ni des opprimés !

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