Réfugiés de Sangatte : Les barbelés de la honte14/09/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/09/une-1730.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Réfugiés de Sangatte : Les barbelés de la honte

Un jeune réfugié irakien de 21 ans fauché par une voiture et décédé quelques heures plus tard ; un jeune afghan blessé par balle par un vigile aux abords du terminal français du tunnel sous la Manche, début septembre ; une trentaine de réfugiés arrêtés dans le tunnel alors qu'ils s'apprêtaient à parcourir à pied les 30 km jusqu'en Angleterre. Mais ce n'est pas le sort des réfugiés qui émeut les responsables de la société Eurotunnel, ni les gouvernements français et anglais, mais le bon fonctionnement et la rentabilité de leur tunnel.

La société Eurotunnel demande, aujourd'hui, la fermeture du centre. Ses dirigeants accusent les réfugiés, qui tentent de passer en Angleterre clandestinement, d'être à l'origine des retards des trains et surtout de leur faire perdre de l'argent à cause des clôtures et des kilomètres de barbelés qu'ils sont obligés d'installer pour transformer l'entrée du tunnel en véritable camp retranché.

Rappelons qu'à l'origine, le centre de Sangatte - un hangar qui appartenait à Eurotunnel - avait été réquisitionné pour accueillir quelques centaines de réfugiés Kosovars fuyant leur pays en guerre. Mais très vite, la proximité du tunnel sous la Manche et l'espoir d'une vie un peu meilleure a attiré des milliers d'autres réfugiés, de toutes les nationalités. Plus de 40 000 personnes seraient passées par le centre depuis sa création, le gouvernement ne faisant rien pour améliorer les conditions d'accueil et d'hébergement. Actuellement, plus de 1 600 réfugiés s'entassent dans des conditions de précarité et d'hygiène inacceptables.

Mais en fait à l'origine de cet afflux de réfugiés en Europe - et dont Sangatte n'est qu'un aspect -, il y a la politique des grandes puissances impérialistes européennes comme la France et la Grande-Bretagne. Celles-ci ont bâti leur prospérité sur l'exploitation des richesses des pays du Tiers Monde et créé les conditions de la misère pour les populations d'Afrique et d'Asie. Des milliers de femmes, d'hommes et d'enfants tentent de fuir désespérément l'oppression parfois, la faim et la pauvreté toujours, et ce dans des conditions dangereuses, voire mortelles. Mais ces mêmes grandes puissances bloquent leur entrée sur leur territoire.

Aujourd'hui, les gouvernements britannique et français s'accusent mutuellement d'être responsables de la situation. Les ministres de l'Intérieur des deux pays doivent se rencontrer, le 12 septembre, mais n'envisagent pas d'autres solutions que de durcir la législation d'accueil des demandeurs d'asile et un renforcement des contrôles aux frontières.

Pour se protéger des nouvelles vagues d'immigration, ces gouvernements n'ont rien trouvé de mieux que de se barricader encore un peu plus, de développer le dispositif policier aux abords du tunnel sous la Manche, de rajouter quelques kilomètres de grillages et de barbelés. C'est beaucoup pour un simple tunnel qui à l'origine était censé rapprocher les peuples et faciliter la libre circulation entre les hommes !

Aujourd'hui, la Grande-Bretagne subit le contrecoup, dans une certaine mesure, de sa politique impérialiste passée où après avoir colonisé le monde entier, ouvert ses portes et accueilli, au gré de ses intérêts, des milliers d'hommes et de femmes originaires de ses ex-colonies, tente de stopper l'afflux massif de nouveaux réfugiés, pauvres parmi les pauvres, qui se dirigent par tous les moyens vers ses frontières. Tandis que le gouvernement français, lui, ne voit pas d'un mauvais oeil, tous ces demandeurs d'asile quitter son territoire.

Pourtant, des solutions il y en aurait, pour ces pays riches que sont la France et l'Angleterre, à commencer par accueillir dignement ces quelques milliers d'hommes et de femmes, de les loger, de scolariser leurs enfants et de leur permettre de trouver un travail.

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