Moulinex : L’optimisme hypocrite des politiciens au service des patrons14/09/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/09/une-1730.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Moulinex : L’optimisme hypocrite des politiciens au service des patrons

Vendredi 7 septembre, les salariés de Moulinex-Brandt apprenaient la décision prise par la direction de déposer le bilan du groupe qui est, de ce fait, placé en redressement judiciaire. Cela signifie le gel des dettes du groupe, dettes qui s'élèvent à plus de 5 milliards de francs, et la menace pour l'emploi de milliers de salariés. Au bout de six mois, une décision devrait être prise, soit la liquidation, soit la reprise de Moulinex-Brandt par un repreneur, si repreneur il y a.

Le PDG de Moulinex, Patrick Puy, a voulu rassurer, et surtout gagner du temps, en déclarant que "la liquidation ne saurait être envisagée aujourd'hui". De tels propos ne coûtent rien ! En fait, il s'est trouvé beaucoup de monde, du PDG au gouvernement, pour afficher un optimisme de circonstance. Le dépôt de bilan de Moulinex deviendrait, à les entendre, "un bol d'air" pour l'entreprise.

Aussi le maire RPR d'Alençon, Alain Lambert, ne cachait pas sa satisfaction car, selon lui, grâce au dépôt de bilan, "l'usine a une deuxième chance" ! Voilà les couleuvres que ces gens-là veulent faire avaler aux travailleurs !

Des syndicalistes reprennent ce refrain, en défendant eux aussi l'idée que le dépôt de bilan pourrait "sauver les emplois". Claude Renault, de la CFDT de Moulinex, a déclaré que ce dépôt de bilan, "ce n'est pas forcément plus grave qu'un plan social avec des moyens financiers inexistants. Maintenant on va pouvoir travailler. Cela va permettre de remettre à plat l'ensemble des choses et de repartir sur de bonnes bases." Et devant les salariés, il a insisté : "Moulinex ne s'arrête pas aujourd'hui. Nous allons assurer un travail comme on sait le faire, pour défendre notre avenir. C'est un passage difficile, mais incontournable pour retrouver une certaine stabilité." En clair, les travailleurs devraient travailler d'arrache-pied pour mettre à profit ce sursis de six moix, afin de sauver l'entreprise. Retrousser les manches, en quelque sorte, pour sauver... les profits des patrons licencieurs. Les déclarations du délégué central de la CGT de Moulinex, Thierry Le Paon, ne sont pas très différentes : "Il faut un projet d'entreprise porteur, définissant des perspectives et une véritable ambition. Nous sommes pour notre part déterminés à faire vivre ce grand groupe industriel pour lequel les salariés ont déjà beaucoup oeuvré". Ces propos rassureront peut-être les notables, les politiciens et les actionnaires, mais pas les salariés qui sont payés - bien mal - pour savoir que ces arguments ne sont que poudre aux yeux. Comme le disait une ouvrière de l'usine d'Alençon, "on va nous laisser croire qu'on va avoir un repreneur pour nous faire travailler et on nous aura fait marner pour rien".

De son côté, le gouvernement fait mine de s'agiter. On est à un peu plus de six mois de l'échéance présidentielle -six mois, c'est justement l'échéance prévue par la procédure du dépôt de bilan. Du coup, Jospin promet : "Il faut absolument aider les employés de Moulinex." Sauf que les travailleurs des entreprises qu'il a dit vouloir aider, comme ceux de Renault Vilvorde, savent ce que valent ces déclarations. Le secrétaire d'Etat à l'Industrie, Christian Pierret, lui, en remet un couche sur l'avenir de Moulinex "qui passe par une reprise du groupe par un véritable industriel". Et il refait le même genre de promesses que Gayssot aux travailleurs d'AOM : "Le gouvernement veillera à ce que des solutions individuelles très précises soient trouvées pour les salariés qui seraient licenciés", prétendant qu'il a eu des réponses positives de PSA, IBM, et de la firme d'électroménager SEB sans autres précisions.

Une chose est sûre, c'est que les actionnaires, eux, sont assurés de ne pas perdre un centime, alors que des milliers de travailleurs, eux, ne savent pas s'ils auront encore un emploi dans quelques mois. A moins que, avec les dizaines de milliers de salariés menacés par des plans sociaux, ils ne se laissent pas berner par les discours que tiennent à l'unisson ministres, patrons et certains syndicalistes, et qu'ils agissent ensemble pour imposer l'interdiction des licenciements.

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