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Macédoine : Vous avez dit la paix ? Quelle paix ?
La signature, le 13 août, d'un accord, censé mettre fin à la guerre larvée qui sévit depuis la fin janvier entre les rebelles albanophones de l'UCK et les forces officielles du gouvernement macédonien, a été suivie immédiatement d'un début de déploiement des forces militaires de l'Otan.
Cette apparente amorce de " solution " à la crise macédonienne est patronnée avec ostention par les grandes puissances, représentées par les dirigeants de l'Otan, de l'Union européenne et de l'OSCE. L'instabilité entretenue par cette guerre dans le bourbier des Balkans, qu'elles ont contribué à créer depuis plus de dix ans, ne les satisfait sans doute pas, même si elles peuvent aussi s'en accommoder.
Cet accord du 13 août est pourtant bien fragile. Il a été signé par les représentants des quatre principaux partis en
Macédoine : il s'agit du SDSM social-démocrate et du VMRO-DMPNE nationaliste, tous deux prétendant représenter la majorité slave des deux millions d'habitants de la Macédoine, ainsi que le PDP et le PDA, tous deux représentant la minorité albanaise, soit environ un quart de la population.
Ces quatre partis forment à Skopje, la capitale macédonienne, un gouvernement d'union nationale. Mais il reste que l'UCK, l'organisation de la guérilla albanaise de Macédoine, n'a pas été associée directement aux négociations qui ont précédé l'accord et que, même si aujourd'hui au moins certains de ses chefs déclarent qu'ils les respecteront, ils n'ont quant à eux rien signé. Or, le hic, c'est que cet accord prévoit entre autres choses que les combattants de l'UCK rendent leurs armes aux forces de l'Otan... ce qui est loin d'être fait.
En échange, le Parlement de Macédoine accepterait de satisfaire certaines des revendications de la minorité albanaise, y compris en organisant une modification de la Constitution. Ainsi, l'albanais deviendrait deuxième langue officielle ; on ferait entrer davan
tage d'Albanais dans la police et l'armée. Les mairies des villages albanophones pourraient accepter ou refuser la nomination du chef local de la police. Mais en fait, l'accord lui-même est truffé de considérations qui rendent l'avenir incertain : rien que les détails des étapes qui doivent jalonner la mise en place de l'accord s'étalent sur trois ans ! Alors d'ici là, bien des provocations ou des incidents pourront relancer les affrontements. Et les uns et les autres savent très bien se renvoyer la balle : jusqu'ici aucun cessez-le-feu n'a été respecté. D'ailleurs, pour le président du Parlement, le chef de l'UCK est toujours un " criminel de guerre ", tandis qu'une branche qui se présente comme la plus radicale de la guérilla albanophone, l'USKH, parle déjà d'un accord traître qu'elle ne respectera pas et a revendiqué de récents attentats.
Les peuples de la région n'ont rien à attendre de bon du côté de ces bandes armées, dont la méthode militaire a consisté jusqu'ici à investir des villages à majorité albanaise et à harceler de là les forces macédoniennes, transformant en otages ces popula
tions qu'elles prétendent défendre. Ces bandes armées s'alimentent par ailleurs à divers trafics pour lesquels la région est une plaque tournante, avec notamment les réseaux mafieux de la prostitution des femmes des pays de l'Est.
Mais, quand bien même les chefs de l'Otan finiraient par envoyer vraiment les 3 500 soldats dont ils parlent, sous le prétexte officiel de récolter l'armement de l'UCK, les peuples de la région n'auraient pas non plus de véritable et durable solution à leurs problèmes à en espérer.
Comme la Bosnie et le Kosovo, la Macédoine à son tour est en passe d'être soumise à un quadrillage par les troupes occidentales. L'ensemble de ces régions est ailleurs surveillé en permanence par des avions et des matériels militaires des grandes puissances. C'est de la mise en place d'un système de protectorat militaire à durée indéterminée qu'il s'agit. Et même si les militaires de l'Otan, qui tentent d'être imaginatifs en cette fin d'été, période de récolte, ont baptisé leur plan pour la Macédoine " moisson essentielle ", il ne s'agit en aucun cas d'une moisson favorable aux peuples.