Moez Mezalouat expulsé, victime de la double peine10/08/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/08/une-1726.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Moez Mezalouat expulsé, victime de la double peine

Moez Mezalouat, 26 ans, était attendu le 31 juillet à sa sortie de prison pour être conduit sous escorte au centre d'Arenc, à Marseille, avant d'être expulsé vers la Tunisie, pays qu'il a quitté à l'âge d'un mois, pour aller vivre à Gennevilliers.

Dealer au Luth, Moez a été condamné plusieurs fois pour "infraction à la législation sur les stupéfiants". Il a été condamné à plusieurs peines de prison "pour une durée cumulative de quatre ans et 6 mois", précise le préfet dans une lettre au sénateur et à la maire adjointe de Gennevilliers.

A la suite de sa dernière peine en avril 2000, il exprime le souhait de changer de vie en rompant avec son passé de délinquant. Il intègre la Régie de quartier du Luth en septembre, d'abord en faisant des travaux de nettoyage de la voirie puis, sur proposition de cette structure de réinsertion professionnelle, il accompagne des personnes âgées dans leurs difficultés de la vie quotidienne.

Pour prendre du champ avec son quartier d'origine, il loge au Foyer de Jeunes Travailleurs, signe un contrat "d'objectifs" avec le club de prévention qui suit son évolution.

Tout semble donc bien se dérouler. A tel point que la commission préfectorale statuant sur les expulsions donne, au mois de novembre 2000, un avis défavorable à son expulsion.

Mais, le 8 février 2001, le ministère de l'Intérieur en décide autrement. Il prend un décret de reconduite à la frontière faisant fi de la nouvelle situation.

Après un contrôle d'identité le 8 mars dernier, Moez est convoqué au commissariat le lendemain, se débat pour ne pas être expulsé immédiatement et reprend 6 mois de prison pour "rébellion et violence sur personne dépositaire de l'autorité publique".

Un comité de soutien pour sa non-expulsion se met en place à Gennevilliers. Une pétition demandant l'annulation de cette procédure recueille un millier de signatures. Des lettres de ses collègues et du directeur du foyer, n'ignorant rien de son passé, mais témoignant de sa volonté de réinsertion, sont envoyées à la préfecture. Enfin, une manifestation est organisée devant la préfecture le 4 mai dernier. Une manifestation est organisée devant la préfecture le 4 mai dernier, et une intervention a été faite au Conseil municipal pour demander à la mairie d'intervenir en sa faveur, ce qui fut effectivement fait.

Mais le 31 juillet, dans le cadre de la surenchère "sécuritaire", Moez est expulsé.

C'est révoltant. D'abord parce que Moez Mezalouat a déjà purgé sa peine et qu'on lui en applique une autre, alors que, de plus, il fait partie de ceux qui, désirant se réinsérer, peuvent représenter un atout dans les situations de tension des banlieues.

Et surtout parce que cette double peine impose à Moez de retourner dans un pays où il est certes né, mais dont il ignore tout. C'est en France qu'il a grandi, qu'il a été à l'école, qu'il a vécu, c'est dans les conditions de la société française dans ce qu'elle a peut-être de pire, ses ghettos de banlieue, qu'il est devenu un "délinquant", qu'il a purgé sa peine, qu'il s'est réinséré. C'est ici qu'il doit vivre !

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