Argentine : Vers une crise sociale ?03/08/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/08/une-1725.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Argentine : Vers une crise sociale ?

Pris entre les nouvelles mesures d'austérité adoptées par 'le gouvernement, 'les effets de la crise économique et les menaces de dévaluation du peso et de retour de l'inflation, les travailleurs 'argentins voient 'leurs conditions 'de vie se dégrader chaque jour 'davantage.

Le récent plan d'austérité, le septième lancé par le gouvernement depuis décembre dernier, prétend arriver au " déficit zéro " d'ici la fin de l'année. Et pour cela il réduit les dépenses sociales, surtout pour l'éducation et la santé, et rogne les salaires des fonctionnaires et les pensions des retraités.

On discute encore, dans les milieux politiques et financiers, du niveau de revenus à partir duquel le couperet tombera : 500 ou 1 000 pesos par mois (3 750 ou 7 500 F) ? Mais la population laborieuse sait bien que, quel que soit le niveau de ses revenus, c'est elle qui est dans la ligne de mire. C'est sur elle que l'austérité va s'abattre, et pas sur les riches, qui échappent de toute façon à tout contrôle, comme toujours.

La misère s'étend de façon alarmante. 17 % des travailleurs sont au chômage, et 20 % seraient touchés par le chômage partiel. 40 % de la population est en dessous du seuil de pauvreté (160 pesos, 1 200 F par mois). 25 % sont même en dessous du seuil d'indigence de 67 pesos (500 F). Les mutuelles, que le chômage prive de cotisations, assurent de moins de moins le remboursement des médicaments et des frais d'hospitalisation, en particulier des retraités. Les malades se retrouvent alors chassés des pharmacies et des cliniques, à moins de pouvoir payer cash. Les petits boulots, la mendicité s'accroissent. La délinquance aussi, avec les " séquestrations express ", à seule fin de dépouiller quelqu'un.

La riposte des syndicats n'est guère vigoureuse. Solidaires au fond des dirigeants politiques, ils se contentent, à chaque plan d'austérité, d'organiser une journée symbolique de grève générale. Mais, frappées directement par les coupes budgétaires, les universités menacent de ne pas reprendre les cours cette semaine, à la fin des vacances de l'hiver austral.

La résistance populaire s'organise tant bien que mal. Le mouvement des coupeurs de route, les piqueteros, s'amplifie et a réuni un congrès national le 24 juillet. Il a annoncé le blocage, ce mardi 31 juillet, de plus de cinquante villes dans tout le pays. La police lancée contre eux a déjà fait des morts (voir LO 1721 du 6 juillet 2001). Mais ce n'est pas cela qui dissuadera tous ces sans-ressources, souvent sans logis, de couper les routes ou de déclencher des émeutes pour obtenir des moyens de survivre.

Les économistes, les patrons et les banquiers, argentins et impérialistes, peuvent bien se disputer sur la meilleure façon de sauver leur économie de la crise. Ils sont tous d'accord pour faire payer encore les travailleurs, spoliés par l'hyperinflation et les privatisations sauvages, et exploités toujours. Certains membres de la majorité gouvernementale affichent maintenant des états d'âme, devant le mécontentement de leurs électeurs. Tout comme certains journalistes et observateurs, ils semblent redouter une réaction des couches populaires et une crise sociale. Souhaitons que leurs craintes se vérifient.

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