Pour la santé, des grands mots20/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1723.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Pour la santé, des grands mots

Les représentants du gouvernement et des professionnels de la santé, le patronat et les syndicats, se sont réunis jeudi 12 juillet au ministère pour ce qu'Elisabeth Guigou a appelé un " Grenelle " de la santé, soulignant par cette allusion aux accords de Grenelle de 1968 que le problème qui se pose actuellement à la Sécurité sociale est grave, important, et qu'il faut trouver des solutions radicales.

De quel problème si dramatique s'agit-il ? Toujours du même : limiter la croissance des dépenses de la Sécu, en particulier celle des soins médicaux, voire réduire ces dépenses. L'an dernier, le budget maladie de la Sécu a augmenté de près de 6 % au lieu des 2,5 % prévus par le gouvernement.

Les dépenses de santé augmentent plus vite. Et alors ? Où est le problème ? N'est-il pas logique que dans une société qui se développe, les dépenses liées à la santé croissent sans cesse ? Surtout quand, dans le domaine médical, le développement de technologies modernes et de traitements sophistiqués entraîne nécessairement des coûts élevés, sans compter d'ailleurs qu'une partie de ces augmentations, dont le budget de la Sécurité sociale pourrait cette fois fort bien se passer, va tout droit dans les poches de l'industrie pharmaceutique. Alors que reproche-t-on aux médecins et aux patients ? De se soigner quand ils sont malades ? Elisabeth Guigou pense-t-elle que l'on fréquente les laboratoires pharmaceutiques et que l'on suit des traitements médicaux par plaisir ?

Il est à noter que si la branche maladie de la Sécurité sociale est restée déficitaire l'an dernier, ce n'est pas le cas des trois autres branches, et les comptes de la Sécu ont été au total excédentaires de 18 milliards de francs en 2000.

En fait, si le gouvernement pousse à l'économie sur les soins, s'il met les hôpitaux publics, par ses restrictions, en situation très difficile, c'est justement parce qu'il lorgne sur le budget de la Sécurité sociale, qui avoisine en importance celui de l'Etat. Le gouvernement voudrait pouvoir y puiser à sa guise pour mener sa politique au service du patronat. C'est ce qu'il a fait par exemple il y a un mois, quand, pour financer les 35 heures - c'est-à-dire distribuer des aides substantielles aux entreprises -, le gouvernement a décidé de confisquer 13 des 18 milliards de francs de la cagnotte de la Sécu.

Bien sûr, à la réunion du jeudi 12 juillet, la ministre n'a pas tenu un langage aussi cru. Elle a parlé de redéfinir les objectifs de dépense en articulation avec les priorités de santé publique. Elle a annoncé sur ce thème l'instauration d'un débat parlementaire annuel et la création d'un Conseil National de la Santé qui réfléchira à des solutions. Et tout ce beau monde est ensuite rentré à la maison.

Vis-à-vis des médecins et des autres intervenants du secteur libéral, le ministère se contente de faire pression dans le sens des économies de dépenses, même s'il n'a pas voulu supprimer la possibilité qu'il a de pénaliser les médecins dont les prescriptions dépasseraient les limites prévues. Ces pénalités n'ont jusqu'à présent pas été appliquées, et il y a peu de chance qu'elles le soient avant les élections. Mais le gouvernement veut garder en réserve cette possibilité qui lui permettrait d'obliger financièrement les médecins à diminuer leurs prescriptions... et les patients à moins se soigner.

Dans tout le pays, le gouvernement a organisé la restriction des soins au point qu'aujourd'hui bien des hôpitaux sont au bord de la rupture par manque de médecins spécialistes, d'infirmières ou d'aides-soignantes. Il diminue, par ailleurs, les remboursements de médicaments, laissant une grande part des remboursements aux mutuelles, mais encore faut-il avoir les moyens d'y souscrire. Alors, c'est bien toute la politique de santé de ce gouvernement qui est à mettre en accusation et à réformer de fond en comble.

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