Insécurité : Le dernier gadget démagogique et gratuit pour faire des voix20/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1723.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Insécurité : Le dernier gadget démagogique et gratuit pour faire des voix

Chirac, lors de son long passage sur toutes les chaînes de télévision le 14 juillet, a fait de l'Insécurité, avec un grand I, le thème majeur de son intervention. Aujourd'hui, selon lui tout serait insécurité ou sentiment d'insécurité, dans les quartiers, dans le travail, dans la nourriture et dans tout ce qui nous entoure. Ce serait là un des problèmes majeurs de la société. En 1995, il avait sorti " la fracture sociale ", qu'il s'était empressé d'aggraver lui-même dès qu'il fut aux affaires. Aujourd'hui il semble que ce soit " l'insécurité " qui soit promise à la promotion de sa campagne présidentielle.

Que voilà un thème qui ne coûte rien, et qui permet de ratisser large, jusqu'à l'extrême droite dont c'est l'unique cheval de bataille. Il ne s'agit là que de propos démagogiques visant à flatter les préjugés sur lesquels spéculent les pires réactionnaires ; ou bien alors d'entretenir le désarroi sincère d'une partie des milieux populaires, en leur mentant avec le dernier aplomb. Car Chirac ment, et il le sait très bien, quand il déclare que pour résoudre la situation des quartiers à la dérive et l'insécurité qui peut y régner il suffit " d'avoir une volonté politique ", de " réorganiser la police " ou encore de " décréter la tolérance zéro " pour la justice.

Sauf à parler de ses propres démêlés avec la justice, tout cela n'est que du vent dont le caractère dilatoire est illustré par le ralliement soudain du président de la République à la dernière trouvaille à la mode sur ce terrain qu'est le couvre-feu pour les enfants de moins de treize ans, initié par quelques maires en mal de publicité par rapport à certains de leurs électeurs. Les partisans de cette mesure invoquent la protection de ces mêmes enfants, la nécessité de mettre les parents face à leurs responsabilités. Or comment ne pas voir qu'elle sera sans effet sur la petite délinquance qui empoisonne la vie de certains quartiers mais qu'elle alimentera chez bien des jeunes et même très jeunes, le sentiment d'être rejetés et exclus.

Tout le monde sait que ce qui mine la vie de nombreux quartiers populaires c'est l'enracinement d'une misère latente et permanente, le chômage de longue durée ou les emplois précaires et sous-payés. Aujourd'hui, en période de " progression économique ", il existe des quartiers ouvriers où 30, 35 % voire plus de la population sont sans travail, parmi lesquels de nombreux jeunes sans avenir et sans espoir. C'est ce désespoir, cette démoralisation qui donnent leur chance à une minorité de petits malfrats qui, à travers une série de trafics et les retombées financières qui en découlent, essayent de faire règner leur loi dans certains quartiers.

Et si une " volonté politique " pouvait changer les choses, ce serait celle qui consisterait à résoudre le problème du chômage, du logement, de l'enseignement. Ce que ne feront ni Chirac, ni Jospin.

Ce serait la " volonté politique " de s'en prendre aux privilégiés, à leurs revenus, à leurs fortunes accumulées, aux grands actionnaires des plus grosses entreprises en leur imposant de payer pour garantir l'emploi et en interdisant les licenciements qu'ils osent décider. Car leur richesse insolente se nourrit du chômage, du sous-emploi et des salaires misérables.

Mais Chirac et Jospin préfèrent se donner l'air de faire quelque chose en prenant quelques mesures aussi démagogiques qu'inefficaces sur le dos de gamins de treize ans et moins.

Pour faire reculer le problème de la petite délinquance qui pourrit la vie de nombreux quartiers les gouvernements et présidents successifs ont l'habitude de faire 90 % de répression et 10 % de social. Un rapport qu'il faudrait inverser, mais on ne peut compter ni sur Chirac ni sur Jospin pour le faire.

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