Cellatex Givet - Ardennes : Un an après20/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1723.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Cellatex Givet - Ardennes : Un an après

L'été dernier, les travailleurs de Cellatex, à Givet, s'étaient opposés à la fermeture de leur entreprise, qui employait 161 personnes. Leur colère, mais aussi les méthodes employées, notamment la menace de faire sauter l'usine, avaient marqué l'opinion.

Les travailleurs de Cellatex avaient bien des raisons d'éprouver un sentiment d'amertume. En 1991, après que Rhône-Poulenc se fut désengagé, les travailleurs avaient vu leurs acquis être remis en cause par les repreneurs, perdant par exemple leur 13e mois. En 1995, suite aux inondations qui avaient frappé la vallée de la Meuse, les ouvriers avaient travaillé jour et nuit pendant six mois pour remettre l'usine en route. Mais quelque temps plus tard, après que l'entreprise eut été reprise par un groupe autrichien, filiale du trust Krupp, un nouveau dépôt de bilan, puis la liquidation venaient mettre un terme à un siècle d'activité.

Un an après...

Un an après la fermeture, dans quelle situation se trouvent les anciens de Cellatex ? Si les travailleurs ont bien obtenu la prime de licenciement, qui avait été, après le maintien de l'activité, l'une de leurs principales revendications, les vagues promesses de réembauche qui leur avaient été faites sont restées lettre morte.

Suite à la fermeture de l'entreprise, une cellule de reclassement a été créée pour " aider " les travailleurs de Cellatex à retrouver un emploi. Un an après, le bilan est bien maigre. Seulement 25 salariés ont retrouvé un emploi stable. Ce sont pour l'essentiel des cadres qui ont pu retrouver une place.

La Sodie, l'organisme chargé du reclassement, a touché 4 millions de francs, mais n'est parvenue à trouver que sept emplois. La plupart du temps, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui sont parvenus à en trouver un, bien souvent loin de la région. Depuis un an, dix familles ont quitté Givet. La Sodie parle de soixante personnes qui, selon elle, auraient trouvé une solution.

Mais ce sont des personnes en préretraite, en formation, en congé-maternité, en maladie, ou qui sont retournées en Belgique. Voilà quels sont les travailleurs qui ne connaîtraient, plus de problèmes ! Pour la Sodie, les difficultés pour trouver un emploi sont imputables aux salariés eux-mêmes. Depuis un an, elle a systématiquement cherché à les culpabiliser, leur reprochant de vouloir des salaires trop élevés, d'être peu mobiles, voire même d'être des fainéants. La Sodie n'a pourtant pas grand-chose à proposer. Une femme qui avait accepté la mobilité s'est vu proposer un CDI pour deux heures de ménage à Reims, à plus de 120 km de Givet. La Sodie va bientôt mettre fin à sa mission, alors que plus de cent vingt personnes n'ont toujours aucune perspective d'emploi. Pour l'instant, les travailleurs sont encore en congé de conversion jusqu'en septembre. Après, ce sera le chômage. Les ex-Cellatex touchent 80 % de leur salaire, des salaires qui étaient pour la plupart de très peu supérieurs au SMIC. Les trois quarts des travailleurs doivent donc vivre aujourd'hui avec des revenus allant de 4 800 F à 6 000 F.

Un patronat local revanchard

Le patronat local n'a pas oublié l'épreuve de force engagée par les travailleurs de Cellatex. L'usine Alcatel toute proche, conformément à une note interne, a préféré embaucher en Belgique plutôt que de prendre un ancien Cellatex, il en a été de même chez Arthur-Martin où trois personnes ont été refusées alors qu'elles remplissaient les critères demandés. Lors d'une réunion avec le patronat, l'un de ses représentants a même déclaré : " Faites-vous oublier ".

Mais les anciens de Cellatex ne sont pas décidés à se faire oublier. Leur association, créée à l'initiative de la CGT, parvient encore à maintenir le lien et à mobiliser.

La situation est bien loin de s'arranger dans la pointe des Ardennes. Dernièrement, une manifestation a eu lieu, à laquelle participaient les anciens de Cellatex, pour dénoncer vingt nouveaux licenciements dans une petite entreprise de la ville.

Quant à l'usine, elle est toujours là avec ses matières dangereuses entreposées. Depuis la fermeture, rien n'a été fait pour dépolluer le site qui est resté en l'état. Mais cette fois-ci, le danger écologique qui avait tant ému certaines bonnes âmes vertes, quand il s'était agi de s'en prendre à des ouvriers qui défendaient leur droit au travail, ne semble plus gêner personne.

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