Argentine - Italie : Le tortionnaire Astiz ne sera pas livré à la justice italienne06/07/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/07/une-1721.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Argentine - Italie : Le tortionnaire Astiz ne sera pas livré à la justice italienne

Le ministre de la Défense, Horacio Jaunarena, a indiqué, indirectement, que le gouvernement du président De la Rua n'extraderait pas l'ex-officier tortionnaire Alfredo Astiz, comme le lui a demandé la justice italienne. Pour le ministre, "ceux qui ont commis des délits en Argentine, doivent être jugés par des tribunaux argentins". Ce qui relève des droits de l'Homme doit à ses yeux céder le pas au "principe de la souveraineté nationale". Tortionnaires de tous les pays, dormez en paix, le principe de la "souveraineté nationale" veille sur vous.

Le ministre s'est ensuite perdu dans des considérations destinées à noyer le poisson, par exemple le fait que la justice italienne utilisait une procédure créée sous Mussolini, quand l'Italie avait des colonies. Sous-entendu : l'Argentine n'est pas une colonie de l'Italie.

La justice italienne poursuivait Astiz pour la disparition de trois Argentins d'origine italienne (ceux-ci peuvent redemander la nationalité italienne, ce que font souvent ceux qui tentent de retourner en Italie pour fuir une situation économique désormais difficile). L'un des trois était une jeune femme enceinte.

L'ex-capitaine de frégate Astiz, figure tristement célèbre de la période de la dictature, fut surnommé "l'ange blond de la mort". Cela est lié aux premières manifestations des Mères de la Place de Mai, ces femmes qui s'étaient mobilisées collectivement pour obtenir des informations sur le sort de leurs enfants, jeunes militants des années soixante-dix arrêtés et le plus souvent assassinés par les militaires. Astiz fut ainsi à l'origine de l'arrestation et de la mort de la première dirigeante de ce mouvement et de bien d'autres.

Astiz a été condamné par contumace en 1990 par la justice française à la prison à perpétuité pour la disparition de deux religieuses vues pour la dernière fois vivantes à l'Ecole mécanique de la marine (ESMA), un des centres de détention et de torture, situé au coeur de la capitale argentine, pendant ces années de dictature qui entraînèrent la disparition de 30 000 opposants.

Solidement haï en Argentine, Astiz vit pour l'essentiel sur des camps militaires. Il a bien été poursuivi l'an dernier par la justice argentine pour "apologie du crime", après une interview donnée dans un magazine, où il se vantait d'être "l'homme le mieux préparé pour tuer un homme politique ou un journaliste". Une déclaration d'autant plus provocante que l'Argentine venait d'être remuée par l'assassinat d'un journaliste.

Mais, pour la plupart de ses crimes, Astiz bénéficie des différentes lois mises en place, à la fin de la dictature, par le radical Alfonsin ou son successeur péroniste Menem pour couper court à la plupart des poursuites contre les militaires argentins : les lois dites du "point final", de "l'obéissance due" et "du pardon" (pour tous).

Les appareils d'Etat ont, comme on voit, toutes les indulgences possibles pour les Aussaresses de tous les pays. C'est que, en dernière analyse, on peut toujours avoir besoin d'eux pour faire régner l'ordre ou contre une population. Alors les exécuteurs des basses oeuvres sont, en toute circonstance, assurés de la quasi-impunité.

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