Le Medef quitte la Sécurité sociale : Bon vent !22/06/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/06/une-1719.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Le Medef quitte la Sécurité sociale : Bon vent !

Denis Kessler, vice-président du Medef, "trouve fort de café", selon ses termes, "l'idée d'aller ponctionner la Sécurité sociale (...) afin d'encourager la réduction du temps de travail, c'est-à-dire l'encouragement public à l'oisiveté" ! En conséquence, il a annoncé le 19 juin la décision du Medef de mettre fin à sa participation à la gestion de la Sécurité sociale.

Telle a été la réaction du patronat à l'annonce par Jospin de son intention de piocher dans les caisses de la Sécurité sociale pour financer les allégements de charges sociales accordés aux patrons qui pratiquent les 35 heures et les bas salaires.

Tout est scandaleux dans cette affaire : la politique du gouvernement qui subventionne les patrons avec l'argent public, pioché dans le budget de l'Etat ou dans les caisses de la Sécurité sociale ; les agissements du Medef, qui considère les caisses de la Sécurité sociale comme sa propre cassette, à gérer comme il l'entend... en partenariat, peut-être, mais avec des organisations syndicales comme la CFDT qui par la voix de Nicole Notat se déclare à sa botte. Sans parler de l'arrogance d'un Kessler qui ose déclarer que la loi Aubry sur les 35 heures est un cadeau aux travailleurs et un encouragement à la paresse, alors que cette loi permet aux patrons d'imposer aux salariés une dégradation générale de leurs conditions de travail et de salaires, avec une flexibilité sans frein, une chasse aux temps morts et une augmentation de la charge de travail et de la précarité, sans les embauches compensatrices annoncées. La facture de cette loi Aubry, favorable en tout point aux patrons et qui est venue se superposer aux dispositions prises par le gouvernement Juppé, s'élèverait à quelque 120 milliards en 2003, pris sur les fonds publics. Des milliards encaissés, sous une forme ou sous une autre par des patrons qui ne protestent évidemment pas sur cet aspect du financement des 35 heures !

Côté gouvernement, sous prétexte qu'aujourd'hui la Sécurité sociale présente un solde globalement excédentaire, Jospin entend la mettre à contribution pour financer les 35 heures. En 2000, le trou de l'assurance maladie serait resté de plus de 6 milliards de francs. Mais en revanche, globalement, le régime général a présenté un excédent de 5,2 milliards, excédent qui devrait s'établir à 7,9 milliards pour 2001, selon les chiffres officiels. L'aubaine est propice à une ponction gouvernementale afin en particulier de boucler la compensation des allégements de charges sociales dont le gouvernement avait fait cadeau aux patrons, avec la loi Aubry des 35 heures. Les recettes censées financer la loi ont été très loin du compte puisque, en 2000, elles se sont élevées à 59 milliards, alors que les allégements de charges devant être compensés s'élevaient à 72 milliards de francs. En 2000, la Sécurité sociale avait déjà assumé plus de 13 milliards. Et en 2001, on ne voit pas comment elle ne devrait pas honorer une ardoise aussi, voire plus importante.

C'est devant ce projet que le Medef a décidé de renoncer à la participation des employeurs à la gestion de la Sécurité sociale. L'élection des administrateurs est prévue au mois de septembre et les 5 000 candidats des organisations syndicales et patronales doivent être désignés d'ici fin juillet. Si le patronat renonce à envoyer des administrateurs à la direction des caisses de Sécurité sociale, cela mettra fin à la gestion en partenariat, telle qu'elle fonctionne depuis les ordonnances de 1967. De la part du patronat, c'est sans doute un nouveau chantage, du même type que celui du mois de janvier sur les retraites complémentaires pour imposer l'augmentation de l'âge de la retraite. Seillière décidement devient coutumier du procédé.

Mais qu'est-ce que les salariés perdraient à ce retrait des patrons ? L'argent des caisses de Sécurité sociale, en particulier du régime général avec celles de l'assurance maladie, de l'assurance vieillesse et des prestations familiales, provient pour l'essentiel des cotisations des salariés eux-mêmes, qui non seulement peuvent parfaitement se passer de la présence du patronat pour gérer ces sommes mais qui devraient exercer, directement, un contrôle sur l'utilisation des fonds collectés. On peut penser qu'alors la politique gouvernementale de financement multiforme au patronat trouverait aussi quelques embûches sur son chemin.

En tout cas, si les patrons veulent se retirer de la gestion de la Sécurité sociale, on ne voit pas pourquoi les travailleurs devraient les retenir !

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