Depuis le 10 juin, Marseille est à trois heures de Paris (et vice-versa !), grâce au prolongement de la ligne nouvelle du "TGV Med". Ce premier jour, la SNCF a essayé de soigner les voyageurs. La gare de Lyon s'est mise aux couleurs de la Provence : groupes folkloriques, distribution de savons, de fruits, installation de palmiers, etc., le tout ne masquant pas les gravats de la gare en chantier ! Les patrons de la SNCF étaient sur le qui-vive, pour que tout marche bien, et même son PDG était présent, dès le matin. Et pour cause, grâce au TGV Med, la SNCF s'apprête à connaître l'afflux de 30 % de voyageurs supplémentaires sur l'axe Paris-Méditerranée et un surplus global de six millions de voyageurs.

Trois jours avant cette mise en service commerciale, à grands renforts médiatiques, Chirac avait inauguré la ligne, tout en préférant se rendre sur les lieux, dans la gare d'Avignon ... en avion et non en train. En voilà un qui connaît les limites de sa popularité.

Il faut dire que côté personnel, l'ouverture de la ligne n'enthousiasme pas les cheminots, car la SNCF s'apprête à faire circuler ses nombreux TGV avec un nombre de rames insuffisant par rapport aux besoins et, surtout, avec un effectif de cheminots bien inférieur à ce qu'il faudrait pour faire face à la demande des usagers et au surplus de travail que ce TGV Med va engendrer.

C'est d'ailleurs pour dénoncer cette situation que le syndicat SUD avait organisé une manifestation symbolique devant les TGV spéciaux de l'inauguration. La CGT, quant à elle, a préféré ne pas s'associer à cette initiative (déposer un préavis pour le 5 juin puis aussitôt le retirer !), pour "ne pas être tenue pour responsable si la mise en place du TGV Med se déroulait dans de mauvaises conditions !". C'est donc une soixantaine de cheminots qui ont rejoint, devant les TGV en partance, une autre manifestation, celle des nettoyeurs Challancin de la ligne C du RER en grève. Et les voyageurs officiels, sélectionnés sur le volet, ont été accueillis aux cris de "Challancin voleur, SNCF complice" !

Guillaume Pépy, le numéro 2 de la SNCF, faisait grise mine : dans la cohue, les officiels avaient bien du mal à atteindre leur train, d'autant plus que les CRS filtraient l'entrée du quai. Le comble, pour les cheminots et quelques autres présents (les CRS eux-mêmes en rigolaient presque !), a été d'apercevoir, parmi les notables, Loïc Le Flock-Prigent, ancien PDG de la SNCF et ex-pensionnaire de la Santé pour malversations financières à la tête d'ELF, ou encore Gérard Longuet, mis en examen pour "recel de corruption" dans l'affaire des marchés des lycées d'Ile-de-France, ou encore Edith Cresson, pas sans tache non plus... Ce qui a fait dire aux cheminots : "Attention, le train spécial pour les Baumettes va partir !". Il ne manquait que Tapie pour agrémenter le tableau ...

Pas de doute, pour la première du TGV Med, l'ambiance était chaude, nous dirions "Méditerranée" ?