Une déclaration d’Arlette LAGUILLER11/05/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/05/une-1713.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Une déclaration d’Arlette LAGUILLER

Selon des propos publiés par Le Parisien du vendredi 4 mai, Daniel Vaillant, ministre de l'Intérieur, aurait déclaré que «Lutte Ouvrière a des pratiques politiques très singulières et n'est pas membre du champ démocratique. Avez-vous entendu parler d'un congrès ? Avez-vous vu des militants qui débattent et votent ? Il faut être sans faiblesse quand on découvre ce type de logique.»

Si le ministre de l'Intérieur a bien dit cela, on peut se demander ce que font les Renseignements Généraux. Lutte Ouvrière tient un congrès annuel depuis sa création en 1968. La date et le lieu en sont pratiquement les mêmes chaque année, les textes adoptés sont publiés dans notre mensuel Lutte de Classes tous les ans.

Certes, à ce congrès la presse n'est pas invitée. Mais tous les partis politiques, y compris le Parti Socialiste, tiennent à huis clos une partie, souvent la plus importante, de leurs débats et de leurs votes, où ni le public ni la presse ne sont admis.

D'ailleurs il suffit de regarder la télévision ou de lire les journaux pour vérifier qu'en dehors de quelques discours de dirigeants à la tribune, la télévision surtout ne montre que des déclarations dans les couloirs et jamais l'ensemble des discussions ni des votes.

Lutte Ouvrière est la seule organisation politique à tenir un congrès chaque année, auquel, en plus des délégués régulièrement élus dans des assemblées locales, nombre de nos militants peuvent assister dans la mesure des places disponibles.

Comme l'immense majorité de nos militants, donc de nos délégués sont des salariés, bien souvent des employés et des ouvriers, nos congrès sont forcément limités à un week-end déplacements compris. Nous ne pouvons donc nous permettre à la fois des séances où nous inviterions la presse à une représentation, accompagnée ou pas d'un vin d'honneur, et d'autres à huis clos.

Au moins un ouvrage a été publié par un responsable du Parti Socialiste qui a assisté, au temps où il était trotskyste, à l'un de nos congrès. Bien sûr il était très critique, mais il sait où s'est tenu ce congrès et où se tiennent tous les autres.

Alors si les Renseignements Généraux ne veulent pas renseigner M. Vaillant, nous pouvons très bien lui communiquer les dates et lieux de notre prochain congrès, sans toutefois l'inviter ou inviter ses informateurs négligents.

J'ajouterai que la phrase «il faut être sans faiblesse quand on découvre ce type de logique» n'est peut-être pas rapportée littéralement par Le Parisien, mais elle me surprend. Que veut dire «sans faiblesse», dans la bouche d'un ministre de l'Intérieur ? Ce terme présage-t-il la répression à la place de la discussion ? Serait-ce cela le «champ démocratique» ?

En ces temps de révélations sur la connaissance de François Mitterrand, ministre de la Justice d'un gouvernement socialiste, de certains actes de l'armée française à l'époque de la guerre d'Algérie, cela fait froid dans le dos.

Si toutes les déclarations actuelles de dirigeants du Parti Socialiste contre Lutte Ouvrière, si celle de Daniel Vaillant espèrent dissuader certains de nos électeurs de voter pour ma candidature lors des Présidentielles, que compte donc faire le ministre de l'Intérieur contre tous les abstentionnistes des quartiers populaires qui, lors des élections municipales, ont été un facteur bien plus important du relatif échec de la gauche que les scores de Lutte Ouvrière ?

Va-t-il envoyer la police pour les obliger à voter ?

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