torture en Algérie - Petit florilège politicien : Cachez ces tortionnaires...11/05/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/05/une-1713.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

torture en Algérie - Petit florilège politicien : Cachez ces tortionnaires...

Le livre et les interviews du général Aussaresses, tortionnaire et fier de l'être, ont fait réagir les politiciens impliqués. Et ils sont nombreux, ceux qui le sont directement. Et ceux qui le sont à cause de leurs solidarités politiques.

Première réaction : l'indignation. Moins pour les exactions bien réelles menées à l'époque par l'armée française que pour la cruauté, voire la crudité, du témoignage du général tortionnaire. Jospin est «choqué», Chirac «horrifié». Le président de l'Assemblée nationale découvre un «militaire indigne». Bayrou exorcise un «sadisme sénile abject». Et, pour le RPR Devedjian, la «tache», ce sont «les aveux de cette barbouze».

En revanche, aucun politicien n'a envie de ramener sur le tapis la guerre d'Algérie, le rôle et les responsabilités de l'État français. On retrouve la complicité d'antan quand les hommes politiques, alors en charge du gouvernement, les Guy Mollet, les Mitterand, laissaient faire les tortionnaires de l'armée, les cautionnaient.

Le ministre de la Défense, Alain Richard, et le politicien de droite Bayrou frôlent le sujet de la guerre d'Algérie mais pour renvoyer dos à dos les protagonistes. Pour le ministre de la Défense, à côté des tortionnaires, il y a eu «tous ceux, militaires et civils, qui ont refusé l'inacceptable». Pour Bayrou, «la guerre c'est l'horreur et l'horreur des deux bords».

Au chapitre des sanctions, Jospin se contente d'«une totale condamnation morale». Imitant Chirac mis en cause dans les «affaires», Jospin prétend ne pouvoir «s'exprimer dans l'exercice de ses responsabilités car c'est à la justice elle-même de le faire».

Chirac fait mine d'aller plus loin et demande au ministre de la Défense qu'il prenne «des sanctions disciplinaires» contre le général. Cela semble ravir le ministre de la Défense, qui dit apprécier «beaucoup que le président de la République ait fixé une ligne de conduite». En bon petit soldat du président RPR, le ministre socialiste a promis d'examiner les sanctions qui peuvent être prises. Va-t-il placer Aussaresses... aux arrêts de rigueur ? On tremble.

Moins coopérante, Marylise Lebranchu exclut que des poursuites judiciaires soient engagées. La loi d'amnistie de 1968 absout, en effet, tous les crimes commis pendant la guerre d'Algérie... Le droit c'est le droit et Aussaresses en sait quelque chose.

La Ligue des Droits de l'Homme a bien entamé des poursuites au nom de l'«apologie de crimes de guerre», mais contre la publication du livre. Tout juste de quoi donner satisfaction à l'ex-ministre de l'Éducation, Allègre. Ce qui le choque, lui, c'est le fait «qu'il se soit trouvé un éditeur»...

Alors, pour finir de noyer le poisson, on nous refait le coup de la vérité et de la mémoire : Jospin invoque un «double impératif de vérité et de mémoire» et pour Chirac, «toute la vérité doit être faite sur ces actes injustifiables».

Pour Chirac, ces actes «ne doivent pas faire oublier les millions de jeunes Français, d'origine algérienne ou métropolitaine, qui se sont battus avec courage et honneur». Quant à Jospin, il estime que «la mémoire impose le rappel des sacrifices consentis, dont le souvenir sera notamment perpétué par un Mémorial national pour les soldats tombés pendant la guerre d'Algérie». Un monument où seront mentionnés les quelque 25 000 soldats français tués mais pas les quelque 600 000 Algériens qui en furent victimes, ou alors seulement les harkis ? Sans compter les dizaines de milliers d'Algériens tués lors de cette conquête de l'Algérie, dont on nous racontait dans les écoles les épisodes édifiants, en oubliant de mentionner les enfumades de grottes dont se vantaient les Bugeaud et les Saint-Arnaud. Sans compter les massacres de Sétif et Guelma, le 8 mai 1945. Un triste anniversaire que la droite comme la gauche se gardent bien de célébrer.

Les Verts souhaitent eux aussi chasser le spectre de la guerre d'Algérie puisque, contre les «crimes contre l'humanité», ils réclament, par la voix de Mamère, une... commission d'enquête parlementaire. En forme d'éteignoir ?

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