Marchands de canons «made in France»11/05/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/05/une-1713.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Marchands de canons «made in France»

La France est depuis des dizaines d'années le troisième pays exportateur d'armes, derrière les Etats-Unis et la Russie. Et c'est dans le Tiers-Monde que sont situés ses principaux clients.

Le ministère de la Défense a publié quelques chiffres sur les années 1990-1999. Pour ces neuf années, les commandes d'armement à l'exportation ont représenté 334 milliards de francs. Cela représente entre 12 et 15 % du marché mondial dans cette branche.

Les principaux clients sont des dictatures, en particulier des pays pétroliers du golfe Persique. Les Emirats Arabes Unis viennent en tête avec 63 milliards, suivis de l'Arabie Saoudite (53 milliards). Le Pakistan et le Qatar arrivent ensuite avec près de 13 milliards chacun.

Mais à côté des ventes de matériel neuf, il y a le marché de l'occasion, sur lequel la France vend ou donne ses armes réformées. Du Maroc à Madagascar, de la Macédoine au Yémen, de la Tunisie au Sénégal, on s'arrache ses missiles, ses mitrailleuses, ses blindés.

Un troisième secteur est celui du courtage, les commerçants français servant alors seulement d'intermédiaires entre vendeurs et acheteurs. Ce secteur est le moins maîtrisé par l'Etat, car il n'exerce aucun contrôle dès lors que les armes ne sont pas produites en France ou ne transitent pas par le territoire français.

L'Etat aimerait, paraît-il, mettre au moins un semblant d'ordre dans les activités de courtage, car elles ont donné lieu récemment à des affaires gênantes, comme celle des ventes d'armes à l'Angola par la société Falcone, dans laquelle ont été mis en cause Charles Pasqua et Jean-Christophe Mitterrand. Le ministre Alain Richard propose un projet de réglementation qui instituerait un contrôle a priori et a posteriori sur chaque opération de courtage.

Mais il proclame bien haut son souci de ne pas gêner les affaires qu'il considère comme légales. Il est vrai que la différence est bien difficile à voir. On peut déjà subodorer que ce projet de réglementation, à supposer qu'il soit adopté, ne permettra pas de contrôler grand-chose. Les affaires légales continueront à servir de paravent aux affaires dites illégales. D'ailleurs le gouvernement se risquerait-il à entraver un commerce aussi profitable, aussi bien pour les intermédiaires que pour les fabricants ?

Quant aux délais dans lesquels cette réglementation pourrait entrer en vigueur, c'est encore autre chose. Les 52 ans mis par la France pour adhérer à la convention internationale de Genève sur le mercenariat, qui date de 1949, donne une idée de ce qu'ils peuvent être.

Alors réglementation ou pas, les marchands de canons ont encore de beaux jours devant eux.

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