LCR : Une politique mal circonscrite27/04/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/04/une-1711.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

LCR : Une politique mal circonscrite

Dans son numéro du 12 avril, Rouge, l'hebdomadaire de la LCR, est revenu sur son bilan de la campagne des municipales, sous le titre "Un succès pour la LCR".

En terme de chiffres, nombre de listes, nombre de voix recueillies par les listes présentées ou soutenues par la LCR, nombre d'élus, le succès, au moins par rapport aux scores précédents de la LCR, est indiscutable.

C'est aussi, comme Rouge s'en flatte, un succès de sa politique "d'ouverture", du moins s'il s'agissait de gagner des voix et des élus. Mais que signifiait cette "ouverture" que Rouge détaille ?

La LCR a "présenté ou soutenu" 91 listes dans ces élections, mais d'après son propre décompte "une trentaine étaient unitaires, à savoir composées par des militants de la Ligue et d'autres courants politiques, quatre listes avec des sections du PCF, les autres avec des courants locaux". Dans une "soixantaine de ces listes (...) La LCR était la seule organisation présente en tant que telle". Et, poursuit Rouge, "le succès de notre campagne tient aussi à l'utilisation du sigle "100 % à gauche". "100 % à gauche", parce que les autres sont de moins en moins à gauche".

Alors, quand l'auteur de cet article écrit plus loin : "Aucune ambiguïté, aucune hésitation pour identifier nos listes comme positionnées contre celles qui soutenaient la politique de la gauche plurielle", cela laisse plus que sceptique, parce que tout, au contraire, était ambigu dans cette campagne de la LCR. A commencer par cette appellation "100 % à gauche" qu'elle mettait en avant. Car si les listes qu'elle présentait étaient "100 % à gauche", les listes de la "gauche plurielle" étaient quoi? 70 % à gauche ? 50 % ? 90 % ?

Cette appellation se présente comme une simple divergence quantitative.

Pour notre part nous considérons qu'il y a une opposition irréductible entre la gauche gouvernementale gérant au mieux les affaires de la bourgeoisie, c'est-à-dire celle des partis bourgeois, et ce que doivent être la politique et les choix des révolutionnaires qui se réclament de la défense des intérêts politiques des travailleurs. Et que dire de "A gauche autrement", ou des appellations diverses, telles que "Tous ensemble à gauche", "Bagnolet plurielle", "Décidons ensemble notre ville", "Annecy à gauche", "2001, une cité, des citoyens" ou "Gauche alternative et solidaire", sous lesquelles apparaissaient les diverses listes constituées avec le PCF ou des associations locales.

Quant à prétendre que les listes soutenues par la LCR étaient sans "aucune ambiguïté (...) positionnées contre celles qui soutenaient la politique de la gauche plurielle", c'est une contre-vérité manifeste. La LCR est fière, en effet, d'avoir conclu des accords avec des sections du Parti Communiste Français. Mais cela ne s'est pas fait sur la base d'une opposition commune à la politique du gouvernement Jospin et au soutien que la direction du PCF accorde à celui-ci (ce qui aurait été une excellente chose si cela s'était avéré possible), mais dans des villes où les têtes de listes PS ou MDC de la gauche plurielle n'avaient pas voulu ouvrir leurs listes, avant le premier tour, au PCF. Mais bien des cas d'ostracisme de ce genre contre le PCF se sont arrangés entre les deux tours, et c'est ainsi que la LCR a obtenu une élue au Kremlin-Bicêtre, dans la banlieue parisienne, sur une liste dirigée par le MDC. S'il ne s'agit pas là d'une ambiguïté, on se demande ce que le mot veut dire !

Plus généralement, le fait d'avoir recherché un accord entre les deux tours, là où cela était possible, avec la gauche plurielle, pour essayer d'avoir des élus était, que cette tentative ait abouti (comme à Clermont-Ferrand) ou pas, comme à Canéjan, une manière de dire que les divergences qui séparent la LCR de la "gauche plurielle" sont somme toute secondaires, par rapport à une appartenance commune à "la gauche". Et il en a été de même de l'appel de la direction de la LCR à voter au deuxième tour pour les listes de la gauche gouvernementale (même si cette décision nationale, répétée avec insistance avant chacun des deux tours, a été localement contestée, le plus souvent par des militants ou des candidats n'appartenant pas à la LCR).

Bien évidemment, cette politique de la LCR était déjà affirmée lors des discussions qui se sont déroulées l'année dernière entre Lutte Ouvrière et la LCR, à propos des élections municipales et c'est celle que la LCR voulait nous imposer.

En tout cas, cela représente effectivement des choix politiques différents. D'ailleurs c'est ce que pense François Hollande, le premier secrétaire du Parti socialiste, qui a déclaré dans l'émission Les quatre vérités, le mercredi 25 avril, qu'il y avait deux extrêmes gauches qu'il ne fallait pas confondre. L'une, selon lui, axait toutes ses campagnes en affirmant préférer la droite à la gauche. Ce qui, en passant, est un mensonge car Hollande serait bien incapable de trouver une telle affirmation de notre part dans nos tracts, nos affiches, nos articles. Il dit que nous ferions le jeu de la droite, ce qui est tout aussi faux. C'est sa politique qui lui fait perdre des électeurs, pas nous ! Car depuis quatre ans qu'il est au gouvernement, son parti, le Parti Socialiste et ses alliés font le jeu du patronat, et en particulier du grand. Cependant François Hollande ne s'est pas trompé d'adversaire en faisant une distinction entre "100 % à gauche", qui selon lui est de gauche, et la politique sans ambiguïté de Lutte Ouvrière lorsqu'il s'agit des intérêts des travailleurs.

Au lendemain de ces élections municipales, la LCR s'est adressée à Lutte Ouvrière (dans une lettre publiée dans Rouge du 12 avril) pour lui proposer une campagne commune aux élections présidentielles et législatives de 2002. Cette lettre nous était à peine parvenue qu'Alain Krivine, dans une conférence de presse, agrémentait cette proposition d'un ultimatum en déclarant que si LO ne répondait pas favorablement à ces propositions, la LCR présenterait un ou une candidate à l'élection présidentielle, et plus de trois cents candidats aux législatives.

C'est sur la base de la politique qui a été la sienne lors des élections municipales que la LCR entend mener les campagnes électorales de 2002, comme l'a affirmé Rouge dans son numéro du 19 avril : "La LCR entend prolonger l'activité des collectifs "100 % à gauche" qui se sont constitués lors des municipales, et nous proposerons à LO de nous adresser ensemble à toutes celles et tous ceux qui souhaiteront s'engager avec nous dans cette campagne, de manière à les associer le plus étroitement possible". Et comme au comité central de la LCR du "début" avril, ses membres s'étaient divisés entre l'approbation d'une alliance avec LO, le refus d'une telle alliance ou l'acceptation sous conditions, dans l'article cité, la LCR précisait que "cette orientation(..) sera tranchée par une conférence nationale en juin prochain".

Nous ne voyons pas pourquoi, alors, malgré son insistance à obtenir de notre part une réponse immédiate à son ultimatum, nous devrions être plus pressés qu'elle. Surtout sans savoir ce que son comité central décidera voire ce que ses militants feront.

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