Licenciements : une seule façon d'empêcher les licenciements : les interdire !13/04/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/04/une-1709.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Licenciements : une seule façon d'empêcher les licenciements : les interdire !

L'émotion soulevée dans la population, et en tout premier lieu parmi l'opinion publique ouvrière, par les plans successifs de Danone et Marks et Spencer, a amené le personnel politique, à gauche mais aussi à droite, à multiplier les déclarations de protestation à l'encontre de ces entreprises qui licencient en annonçant des bénéfices ; et qui annoncent souvent ces licenciements justement pour faire encore croître les bénéfices, ou du moins en faire miroiter l'espérance, et ainsi faire monter le cours des actions, pour le double bénéfice des actionnaires.

Certains à gauche, comme Chevènement un temps et aujourd'hui la " gauche socialiste " par l'intermédiaire de Julien Dray, parlent de la réintroduction de l'autorisation administrative de licenciement, un spectre qui ne fait peur à personne. Car c'est pendant son existence, introduite par Chirac, que le nombre des licenciements s'est véritablement envolé.

D'autres se creusent la tête pour avoir l'air de faire des propositions répondant à l'attente populaire, mais qui sont souvent des formules plus qu'autre chose. Ainsi Madelin qui s'était laissé aller, sur le mode de la démagogie, à proposer d'instituer le " zéro licenciement ", a dû préciser plus tard à son électorat de droite et de patrons obtus ce que cela voulait dire. Zéro licenciement ? C'est ce que fait Danone, a-t-il précisé, en reclassant, selon ses dires, quasiment tout le monde. Cela ne veut dire en aucune manière, dans la bouche de Madelin, empêcher les patrons de se débarrasser de leurs salariés.

Du côté de l'entourage de Jospin il paraît que l'on planche sur un arsenal législatif, qui serait à proposer en urgence au mois de mai à l'occasion du retour à l'Assemblée en deuxième lecture de projets de lois se rapportant aux problèmes sociaux. Mais comme le précise le porte-parole du PS Vincent Peillon, il s'agit simplement " de mieux encadrer la procédure des plans sociaux " lorsqu'une entreprise réalise des profits. François Hollande, premier secrétaire du Parti Socialiste, a précisé qu'il s'agissait de " rendre plus coûteuses les décisions de supprimer des emplois ". Quand on sait que dans les grandes entreprises les plans de licenciements sont provisionnés dans les comptes à hauteur de centaines de millions de francs voire de milliards, ce ne sont pas quelques mesurettes marginales qui vont leur arrêter le bras plus que toutes les autres mesures prises par le passé. Et il y en a eu de nombreuses qui se sont révélées totalement impuissantes à faire échec aux décisions patronales, sauf à la marge et de façon très partielle.

Pourtant, chacun connaît la solution pour empêcher véritablement les licenciements collectifs dans les entreprises, et d'abord dans celles qui font du profit. Ce serait de les interdire purement et simplement par la loi sous peine de réquisition au bénéfice de la collectivité.

Cela serait utopique et impossible à faire ? Mais non ! Il existe dans la loi une multitude de cas où les sociétés industrielles et commerciales peuvent se voir réquisitionner sur- le-champ leurs avoirs en banque, voire leur simple droit à continuer une activité. Des procédures permettent ainsi de récupérer les machines, les stocks, les terrains immobiliers. Il s'agit de tout ce qui organise les relations des entreprises avec ceux qui leur doivent de l'argent et avec ceux à qui elles en doivent. De même en cas de besoin, pour ses finances, l'Etat a les mêmes prérogatives, encore plus facilitées par la loi.

Alors de la part de ceux qui refusent ces mesures de contrainte contre les patrons, qu'ils jugent trop radicales, il ne s'agit que d'un choix de classe. C'est par principe et non par impossibilité pratique qu'ils refusent de faire quoi que ce soit de sérieux et d'efficace, pour ôter le droit de licencier à ces grands patrons qui s'octroient des bénéfices scandaleux au travers des licenciements.

Le même Vincent Peillon, exprimant la pensée de Jospin et du gouvernement socialiste, et répondant à la proposition reprise à son compte par Bernard Thibaut pour la CGT, sur l'éventuelle interdiction des licenciements, a déclaré : " L'interdiction des licenciements pour les entreprises qui font des bénéfices n'est pas une solution, car faire des bénéfices n'est pas préjudiciable ". En effet ce n'est pas préjudiciable... aux actionnaires, mais le fait de licencier pour accroître ses bénéfices est intolérable pour toute la société, à l'exception justement des actionnaires. On aura compris que c'est au bout du compte de leur côté que se situaient le gouvernement et le Parti Socialiste, quelles que soient leurs simagrées.

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