Abilis (Grenoble - Isère) : Des grévistes déterminés13/04/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/04/une-1709.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Abilis (Grenoble - Isère) : Des grévistes déterminés

Le personnel de nettoyage de la société Abilis, intervenant sur six usines du sud grenoblois, dont quatre de la chimie, est en grève depuis le lundi 2 avril. Ces travailleurs réclament le treizième mois (déjà perçu par les cadres et le personnel de bureau de l'entreprise), une prime de transport de 300 F (au lieu des 34 francs proposés par la direction) et des indemnités de congés maladie payées intégralement : à l'heure actuelle il y a onze jours de carence !

Le mécontentement est profond : il faut dire que le travail est difficile et ingrat. Les travailleurs sont soumis à des pressions quotidiennes et à des conditions de travail déplorables pour des salaires misérables. Le travail à temps partiel imposé devient une généralité car les patrons sont exonérés de charges sociales pour ce type de contrat. Certains salariés sont obligés de travailler sur plusieurs chantiers pour gagner le SMIC, ce qui donne des amplitudes de travail à la journée pouvant aller de 5 heures à 22 heures pour une même personne.

Lundi 2 et mardi 3 avril, suite à une réunion de syndiqués CGT Abilis, il fut décidé de commencer par une heure de grève en fin de poste. Mais dès le mercredi, le mouvement se durcit : devant Rhodia, à Pont-de-Claix, les travailleurs décidèrent la grève illimitée. Jusqu'au vendredi une quarantaine de grévistes organisèrent des rassemblements devant les différents sites où ils font le nettoyage. Le jeudi, par exemple, accompagnés de délégués CGT de Rhodia, ils ont interrompu une réunion de délégués du personnel de cette usine pour interpeller le patron sur le contrat négocié avec Abilis. Ils entendaient ainsi dénoncer ces grands groupes qui négocient des contrats à bas prix pour grever le moins possible leurs profits, et qui sont donc les premiers responsables des conditions de travail difficiles et des salaires de misère du personnel de nettoyage.

Le vendredi 6 avril au matin, les grévistes furent appelés au siège par le patron local qui les informa que le DRH était spécialement venu de Paris, (en voiture, à cause de la grève des cheminots, le pauvre !) pour négocier. Et comme à midi aucune mesure concrète n'était annoncée, les grévistes décidèrent de s'installer devant l'entrée du siège, bloquant la sortie des patrons. Une travailleuse déclara que ça faisait vingt ans qu'elle " ramassait la merde " et qu'elle n'avait jamais vu un DRH, alors pour une fois qu'elle en voyait un, elle le gardait ! Plusieurs entrevues tournèrent court dans l'après-midi, la hiérarchie refusant de négocier sur le treizième mois, revendication qui tient particulièrement à coeur aux grévistes. Ceux-ci ont donc vu défiler l'après-midi tout un ballet de trois huissiers, deux avocats de la direction, deux RG, un commissaire de police, et ils ont même eu au téléphone le sous-préfet... tous là pour décourager les grévistes et se faire les avocats du patron. Mais rien n'entama la détermination des grévistes, qui se sont bien amusés aux dépens de ce défilé de beau monde. Même les six assignations en référé n'ont pas ému puisque certaines de ces assignations ont rejoint les déchets amassés devant l'entrée.

A la fin de la journée, l'ambiance était toujours au beau fixe malgré la pluie. Tout le monde se préparait à dormir sur place, jusqu'à l'arrivée de vingt CRS vers 22 heures qui délogèrent du portail avec brusquerie les travailleuses et les travailleurs, pour permettre aux patrons engouffrés dans une voiture de s'enfuir... sous les huées des grévistes en colère, criant " Abilis, c'est la honte ".

Lundi 9 avril, les grévistes, toujours aussi déterminés, se sont rassemblés dès 4 h 45 devant une entreprise pour en convaincre d'autres de les rejoindre. Puis ces trente travailleurs se sont retrouvés devant le tribunal et ont élu sept délégués représentant les grévistes. Ensuite, au tribunal, l'avocat de la direction a annoncé que celle-ci se désistait. Tout le monde a applaudi ce premier recul.

Le lendemain, les grévistes ont diffusé des tracts devant les sites où ils travaillent, expliquant aux ouvriers les raisons de leur mouvement et en quoi les directions de ces entreprises sont responsables de leur situation en sous-traitant le nettoyage. L'après-midi, ils sont retournés devant le siège et ont trouvé portes et volets clos, la direction, pas courageuse sauf pour appeler les CRS, ayant déménagé.

Un grand patron de Paris était annoncé pour le 11 avril et une réunion de négociation fixée. En tout cas, les grévistes sont déterminés à rester mobilisés tous ensemble jusqu'à satisfaction de leurs revendications.

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