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Leur société
Chirac convoqué chez le juge Halphen : Président au-dessus des lois
A peine le quotidien Le Parisien du 28 mars avait-il révélé que le président Chirac avait été convoqué comme témoin par le juge Halphen à propos de l'affaire des HLM de Paris, un communiqué de l'Elysée a répondu brièvement, comme on pouvait s'y attendre, que le président dela République ne se rendrait pas à la convocation.
C'est la fameuse cassette de Jean-Claude Méry, où celui-ci expliquait, un peu avant sa mort, les modalités des versements de pots-de-vin du patronat du bâtiment aux grands partis politiques, et en particulier au RPR, qui a conduit le juge à convoquer le président.
Le président est convoqué comme témoin. Du jamais vu en 43 ans de Vème République. Le juge aimerait avoir la version de Chirac sur les aveux posthumes de l'ancien réalisateur de fausses factures pour le RPR, notamment sur cette valise de 5 millions destinée au RPR, remise en présence du maire de Paris de l'époque, en l'occurrence Chirac ; témoignage qualifié par Chirac d'"abracadabrantesque".
Il avait déjà été question de poursuivre Chirac dans une autre affaire qui touche le RPR, celle des emplois fictifs de la mairie de Paris, mais une opportune décision, en 1999, du Conseil constitutionnel, encore présidée par Roland Dumas, avait établi que le président est protégé pendant tout son mandat de toute poursuite pénale, ce qui interdit toute poursuite contre lui.
Ce rappel opportun d'un privilège digne des rois de l'Ancien Régime avait permis à Chirac de faire un joli numéro d'hypocrisie à la télévision, le 14 décembre. Il avait fait mine de regretter que lui, "gardien de la séparation des pouvoirs", était empêché de se rendre à tout "rendez-vous judiciaire", alors que "être entendu comme témoin (lui) permettrait de tordre le cou à un certain nombre de rumeurs et d'insinuations", ajoutant que "le président ne peut être soumis ni au pouvoir judiciaire ni au pouvoir militaire". Et aussi : "Je ne peux pas dépendre d'un magistrat tant que je suis en fonction".
Il y aurait bien la possibilité de poursuivre Chirac devant une Haute Cour, mais il faut qu'au moins 58 députés en fassent la demande. Un député socialiste, qui n'a trouvé que cela pour qu'on parle de lui, a entrepris la collecte des signatures mais les députés de son propre parti (et les autres) les lui refusant, il en est pour ses frais : les dirigeants socialistes n'ont pas plus envie que ceux de droite de faire monter la mayonnaise des "affaires", car nul ne sait ce qui peut sortir de ce petit jeu.
Restait donc la convocation comme témoin. Que fera le juge maintenant que Chirac a précisé qu'il ne s'y rendra pas ? Fera-t-il appel à la force publique, comme la loi le lui permet pour le faire venir ? Le socialiste Charasse qui avait refusé de témoigner s'était vu infliger... une simple amende.
Pourtant Chirac est mis en cause directement dans six affaires, ce serait la moindre des choses qu'il s'explique comme le commun des mortels plutôt que de fuir les explications en se retranchant derrière des paravents juridiques, en invoquant le respect dû à la personne du président. Comment pourrait-il y avoir ce respect si justement il refuse de rendre des comptes devant la population ?
A l'inverse des commentaires rabachés à propos du procès de Guy Georges, les dirigeants politiques de ce pays, et le principal d'entre eux, préfèrent apparemment, aux vertus de l'aveu, le "n'avouez jamais". Tant pis pour la "transparence de la vie politique" que tous ne cessent d'invoquer !