Lever Haubourdin-Nord : Unilever a dû reculer !26/01/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/01/une-1698.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Lever Haubourdin-Nord : Unilever a dû reculer !

Au retour des fêtes, début janvier, les tentatives d'intimidation de la direction de Lever avaient avorté : au lieu de nous interdire l'entrée de l'usine, c'est l'usine qui s'est retrouvée avec les barrières automatiques hors d'usage et plusieurs "entrées" supplémentaires, dans les grillages et les murs de plaques de ciment.

De même, nos visites d'hypermarchés avaient repris, malgré les intimidations de certaines directions de magasins.

Plusieurs dizaines d'entre nous auraient bien continué la mobilisation pour faire pression sur la direction de Lever. Il n'y avait plus d'espoir d'empêcher la fermeture de l'entreprise, mais il était peut-être encore possible d'imposer à Lever des concessions financières plus importantes pour les licenciés et de meilleures conditions de préretraites pour ceux d'entre nous qui ont atteint ou dépassé 50 ans.

D'âpres négociations se sont alors engagées, avec la direction de Lever et aussi des responsables de la direction départementale du travail et de l'emploi (DDTE), soutenues de l'extérieur par des dizaines d'entre nous.

Et la direction a dû faire de nouvelles concessions qui nous tenaient particulièrement à coeur : alors que tout le monde va être licencié, les seize employés du Comité d'entreprise ont été inclus dans le plan social et bénéficieront des mêmes suppléments d'indemnité et des possibilités de préretraites.

Et surtout quatre intérimaires, qui travaillaient assez régulièrement à l'usine depuis des années et qui se trouvaient là au moment de l'annonce des licenciements en mars 2000, auront droit aux mêmes conditions que l'ensemble du personnel. Ce n'est qu'une goutte d'eau retirée à l'océan des bénéfices d'Unilever, mais cela avait semble-t-il une valeur symbolique si importante pour tous ces messieurs à 1 million de francs de salaire mensuel qu'il a fallu que, à notre exigence, s'ajoutent les menaces de l'inspection du travail.

Aujourd'hui, un "protocole d'accord de fin de conflit" est signé, mais tout n'est pas réglé, et l'application réelle de nombreux points du "plan social" dépendront de notre capacité de mobilisation et des pressions que nous exercerons, sur la direction de Lever bien entendu, mais aussi sur l'administration et les responsables de la DDTE.

Dans une ancienne entreprise Lever, Fralib, au Havre, les salariés sont encore en train de se bagarrer, trois ans après, pour l'application d'un plan social pourtant signé par la direction de Lever.

Ce n'est certes pas une victoire complète, qui était de toute façon difficile à imposer à la direction d'une des plus puissantes multinationales du monde. Mais, malgré les menaces de la direction de Lever, malgré les mauvais augures du Parti Socialiste - Martine Aubry en tête - qui prédisaient les pires catastrophes si nous maintenions nos pressions sur la direction de Lever et sur les directions des hypermarchés visités, c'est-à-dire le licenciement sec et le désengagement du repreneur, tous ceux qui ont choisi de se battre ont toutes les raisons d'être fiers de leur choix.

L'ensemble du personnel licencié, la grande majorité d'entre nous, touchera l'indemnité légale de licenciement basée sur l'ancienneté, augmentée par Lever de 300 000 francs, non imposables (sauf CSG et RDS). Ceux qui ont plus de 50 ans et seraient transférés vers le repreneur Bilore sans licenciement toucheront quand même 100 000 francs d'indemnité.

Pour ceux qui retrouveront un travail, leur niveau de salaire actuel sera garanti pendant deux ans, pour un montant maximum de 2 000 F par mois. Pour ceux qui seraient candidats à la reprise par Bilore - et qui seraient repris - Lever compensera la perte de salaire pendant trois ans, au-delà même des 2 000 francs par mois. Mais le 13e mois et les primes de nuit ne seront pas compensés.

L'accord de Cessation d'activité des salariés âgés pour l'industrie chimique ("CASAIC"), applicable dans le cadre d'une fermeture d'entreprise, c'est-à-dire sans les conditions de travail nocturne ou posté, ouvrira aux salariés de 55 ans, ou atteignant 55 ans d'ici fin 2004, l'accès à des indemnités équivalentes à 65 % du salaire brut, avec un minimum de 7 500 francs brut par mois, jusqu'à leur retraite. Et leur indemnité de départ en retraite sera calculée sur la base de l'indemnité de licenciement, plus favorable.

Pour les salariés optant pour le CASAIC chez Bilore, Lever maintiendra sa participation à la mutuelle, la retraite complémentaire et la prévention maladie-décès.

Un plan de conversion de deux ans sera mis sur pied pour tous ceux qui ont aujourd'hui 53 et 54 ans, leur permettant d'accéder eux aussi au CASAIC avant sa clôture, fin 2004.

Quant à ceux qui ont 50, 51 et 52 ans aujourd'hui, ils pourraient être "détachés temporairement" par Lever chez Bilore et, s'ils le demandent, intégrer le CASAIC à leur 55e anniversaire.

D'autre part, Lever s'est engagé à retirer toutes les plaintes déposées suite aux actions et à faire stopper les poursuites judiciaires engagées contre une cinquantaine de salariés. La direction s'est engagée aussi à demander à ses clients, les hypermarchés, d'en faire autant.

Mais la roublardise des patrons et la pesanteur des responsables des administrations, dont beaucoup de travailleurs ont déjà fait l'expérience, imposeront d'exercer encore de nombreuses pressions pour que ces mesures d'âge compliquées soient appliquées et appliquées de la façon la moins restrictive possible pour les travailleurs.

Et ceux qui travailleront chez Bilore devront eux aussi conserver les traditions de mobilisation acquises pendant ces neuf derniers mois. Ils devront affronter un patron qui a d'emblée annoncé vouloir produire le même tonnage, avec deux fois moins de personnel et des salaires 40 % inférieurs qui s'appliqueront directement aux embauchés hors Lever et dans trois ans à tout le monde!

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