Le 25 janvier, le tous ensemble et l’unité syndicale26/01/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/01/une-1698.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Le 25 janvier, le tous ensemble et l’unité syndicale

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en ce moment le patronat est un vigoureux partisan de la lutte des classes. Au nom de la "refondation sociale", il conduit une attaque en règle, méthodique, contre les travailleurs. Le MEDEF a commencé avec le PARE (le prétendu plan d'aide au retour à l'emploi) qui va permettre d'imposer aux chômeurs n'importe quel travail sous-payé. Il s'en prend aujourd'hui aux retraites, en annonçant de manière provocante et brutale son intention de faire passer les salariés de 40 à 45 années de cotisation pour une retraite à taux plein. Il utilise le chantage, en proposant que les patrons cessent de payer les contributions à l'ASF (Association pour la structure financière qui assure une partie du financement des retraites complémentaires du privé). Et dans une dernière fanfaronnade, il affirme que "si les organisations syndicales ne veulent pas admettre le principe de l'allongement de la durée de cotisation ou du relèvement de l'âge de départ à la retraite, il est inutile de venir nous voir"!

Le gouvernement joue les neutres prétendument bienveillants pour les intérêts des travailleurs. Il avait déjà fait le coup avec le PARE pour finir par accepter une mesure qui s'en prend gravement à tous les travailleurs privés d'emploi. La stratégie est simple : le MEDEF montre des exigences exorbitantes, comme cela le gouvernement de "gauche plurielle" peut prétendre au final l'avoir fait reculer alors que la situation sociale continue à se dégrader.

Ces grosses ficelles ne dupent que ceux qui veulent bien y croire. Le gouvernement a mis en place les 35 heures, permettant la flexibilité et le blocage des salaires. Il refuse d'augmenter le salaire minimum, d'où d'hypocrites mesures sur la CSG et le crédit d'impôt. Avec ses propres salariés, dans la fonction publique, l'Etat-patron ne veut rien lâcher sur les salaires. Et il aimerait bien, comme Fabius l'a annoncé, augmenter la durée de cotisation aussi pour les fonctionnaires, même s'il y va sur la pointe des pieds : c'est ce qui avait mis le feu aux poudres en 1995.

Le front syndical n'est pas l'unité des travailleurs

Sur le problème des retraites les confédérations syndicales appellent à une journée d'action commune le 25 janvier. Un progrès : elles ne l'avaient fait ni pour les lois Aubry, au moment ou chaque secteur se bagarrait localement dans son coin, ni sur le PARE! La pression de la base se ferait-elle plus forte ? Les retraites sauce MEDEF ont suscité une grande émotion dans les entreprises. Les salaires donnent lieu à une série de luttes. Les nouveaux plans de suppression d'emplois, Danone, Usinor, Bull et d'autres, suscitent une indignation générale.

Pourtant les manoeuvres sur la route qui mène à une riposte de l'ensemble des travailleurs continuent. Après l'échec des négociations avec leur ministre et le succès des manifestations du 18, on pouvait s'attendre, et de nombreux travailleurs du public s'attendaient, à ce que les fédérations syndicales profitent du 25 pour en faire le prochain point fort de la mobilisation. Certaines, la FSU, FO, ont évoqué cette possibilité. Mais voilà, d'autres, la CFDT, l'UNSA, ont mis leur veto. Et les premières se sont inclinées, se contentant d'appeler à manifester le 25 mais à faire grève... le 30. Vraiment, la bonne méthode pour aider au succès des manifs...

Prétexte pour la CFDT : les problèmes des salaires des fonctionnaires et des retraites du privé n'ont rien à voir. Comme si la retraite n'était pas une forme de salaire différé. Comme si quand les salaires sont gelés les retraites n'en pâtissent pas. Comme si le public ne savait pas que si les plans du MEDEF passent, ses retraites en subiront le contrecoup. Comme si surtout à une offensive globale il ne fallait pas opposer une contre-offensive globale.

Prétexte pour les fédérations qui se sont inclinées devant le diktat de la CFDT : ne pas rompre le front syndical. Mais qui a donc rompu non seulement le front syndical mais l'unité des travailleurs entre ceux qui se joignent au 25 avec le privé et ceux qui proposent au public une journée rien qu'à eux le 30 ? Y avait-il meilleure occasion pour obtenir l'assentiment de la majorité des travailleurs du public que d'opposer au diktat des briseurs de l'unité, la volonté de ceux qui sont pour le tous ensemble ?

En fait la plupart des directions syndicales ne veulent surtout pas s'en prendre au gouvernement. La CFDT dit ouvertement que défiler tous ensemble le 25 reviendrait à "tendre une perche au MEDEF en portant la responsabilité du problème des retraites sur le gouvernement". Elle exauce ainsi les voeux du ministre qui exprime la même crainte qu'on prenne le gouvernement pour cible. Aussitôt dit, aussitôt fait... tout le monde s'aligne.

En dépit des hésitations ou des manoeuvres syndicales le 25 reste une occasion pour les travailleurs de mesurer leur force et de regonfler leur moral, qu'il faut saisir. Tout le monde discute des salaires, des retraites, de la peur du chômage. Il y a du répondant. Quand on parle de croissance, il y a des travailleurs qui réclament leur dû : les grèves de plus en plus nombreuses pour les salaires, entre autres à la Caisse d'épargne ou chez les traminots de Rouen, en ont témoigné. L'annonce des licenciements à Danone rappelle que la rapacité des patrons va toujours plus loin.

Dans cette situation la riposte des travailleurs est indispensable et possible, tous ensemble, public et privé, pour reprendre la lutte des classes, mais dans l'autre sens cette fois. Mais pour cela il est bien sûr qu'une seule journée ne suffira pas et qu'il faudra lui donner une suite.

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