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Dans les entreprises
LU Château-Thierry (Aisne) : La rage au coeur
A l'usine LU de Château-Thierry, les plans de la direction concernant ce site ainsi que les sept autres usines concernées par les licenciements sont ressentis comme inacceptables. C'est ce qu'a montré la participation massive (près de 90 % des ouvriers et des ouvrières) aux débrayages de deux heures qui ont eu lieu lundi 15 et mardi 16 janvier. Tout le monde s'apprêtait aussi à venir en grand nombre à la manifestation organisée le mercredi 17 janvier à Château-Thierry.
On savait que le mouvement se développait aussi dans les autres usines. La grève à Calais avait été reconduite jusqu'au mardi 16 janvier. A Charleville, un appel à la grève était prévu pour ce même jour. Toulouse a débrayé et devait décider de la suite du mouvement. Pour l'échéance proche, la montée à Ris-Orangis, à l'occasion du Comité central d'entreprise, tout le monde espérait que, ce jour-là, la grève serait totale sur l'ensemble du secteur biscuiterie du groupe Danone. En tout cas à "Château", plusieurs cars étaient prévus.
L'annonce de ces projets de fermeture a été ressentie comme un véritable coup de massue par le personnel de l'entreprise. A l'usine, dans les cités, dans les supermarchés de la ville, on n'entendait parler que de cela. Et bien des travailleurs, la rage au coeur, étouffaient une larme.
Les travailleurs de l'usine de Château-Thierry savent qu'ils sont à l'origine des milliards de profits que Danone a faits sur le dos de tous ceux qui, depuis des années, produisent ses biscuits sucrés ou salés que les dirigeants du trust jugent désormais "insuffisamment rentables".
7,9 % de profits, cela ne suffit pas aux actionnaires de Danone. Mais ces 7,9 % que Danone a empochés, ils nous ont coûté cher. Ne parlons pas des salaires, qui n'ont pas augmenté depuis bien longtemps. Mais les dirigeants de l'actuel LU, hier Belin, ont tout fait pour nous faire suer du profit.
L'usine de Château-Thierry, il y a onze ans, comptait un petit millier d'ouvrières et d'ouvriers. En 1990-1991, il y a eu - rentabilisation obligeait, paraît-il - un premier plan de licenciements dans lequel 256 de nos camarades se sont retrouvés à la rue. Puis la direction a voulu imposer des contrats intermittents, qu'elle a dû remballer. Puis il y a eu encore des dizaines et des dizaines de licenciements, plus ou moins camouflés. En tout cas aujourd'hui les chiffres sont là, nous sommes 322 à l'effectif alors que la production est quasiment la même qu'il y a douze ans. Et il paraît que c'est encore 322 de trop. C'est inacceptable.
Pendant toutes ces années Danone a empoché les fruits de la croissance, mais pour les travailleuses et les travailleurs qui ont gardé leur emploi, cela été l'augmentation des cadences à la limite du supportable, la chasse systématique aux secondes que la direction estimait gaspillées. Cela a été les pressions pour venir travailler le samedi, la nuit, car il fallait faire face pour les commandes de Noël, de Pâques, etc. Et l'on n'avait pas le choix, les cadences sont telles que bien des ouvrières sont, en fin de journée, au bord de l'épuisement. Rien d'étonnant à ce que le nombre d'accidents, parfois graves, ait considérablement augmenté.
Mais Danone, après avoir empoché, n'en a rien à faire de la sueur et du sort des travailleurs. C'est avec la rage au coeur que toutes et tous se disent que, s'ils laissent faire, ils grossiront les rangs des chômeurs, dont on ose nous dire que le nombre est en train de se résorber durablement.
La direction de Danone au niveau national, comme celle de LU à Château-Thierry, veulent calmer les esprits en prétendant que ces projets de fermeture d'usine, de "restructuration" au niveau européen, sont à l'étude, sans plus. Les chefs nous ressassent que nous ne devons pas écouter les rumeurs. Mais chacun voit que la direction de LU se garde bien de s'engager à maintenir les usines et les emplois : elle voudrait seulement nous lanterner pour émousser nos réactions.
Mais les travailleuses et les travailleurs de LU ne sont pas les seuls à vouloir faire reculer la direction de LU-Danone. Chacun sait que, si l'usine ferme, ce ne seront pas seulement 322 familles mais toute la ville qui en subira les conséquences. Et quand on sait que, dans l'Aisne, l'usine de Jussy est elle aussi concernée, c'est toute la région qui risque de connaître plus de chômage, plus de précarité et plus de bas salaires.