La précarité s’installe de plus en plus22/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1693.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La précarité s’installe de plus en plus

Depuis deux ans, le gouvernement Jospin promet qu'il va prendre des mesures pour limiter le recours aux contrats précaires, intérim et CDD (contrats à durée déterminée).

Il n'empêche que ce travail précaire explose (62 % d'augmentation des emplois en CDD, intérim et temps partiels en 1999). Martine Aubry, quand elle était ministre de l'Emploi, a bien lancé quelques injonctions, restées lettre morte, au patronat pour qu'il n'abuse pas des CDD. Le gouvernement a plusieurs fois agité la menace de taxer les entreprises qui y ont trop souvent recours. Dès fin 1999, il était question de créer un système de bonus/malus sur les cotisations sociales pour taxer ou récompenser les entreprises selon leur recours abusif ou non aux contrats précaires. La mesure devait être votée au cours de l'examen d'un projet de loi fourre-tout dit de «modernisation sociale» au printemps dernier. Mais son examen a été repoussé à janvier 2001. La mesure figurait à nouveau en bonne place «comme priorité pour l'amélioration de l'emploi» dans la déclaration commune faite au lendemain du sommet de la gauche plurielle, le 7 novembre dernier.

Sauf que, dans le projet de loi finalement adopté par la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale le 13 décembre dernier, toute idée de taxation a disparu pour laisser la place à un modeste aménagement du code du travail. La prime de précarité en fin de CDD passerait de 6 à 10 % (comme pour les contrats d'intérim). Le délai entre deux contrats précaires sur un même poste devrait être allongé pour éviter qu'un salarié, dont le CDD est interrompu le vendredi, revienne travailler dès le lundi avec un nouveau contrat. Enfin, il s'agirait de pénaliser les entreprises «en cas d'abus manifestes» dans l'utilisation des CDD en leur interdisant pour une durée déterminée de recourir à nouveau à des CDD. La notion d'abus sera laissée à l'appréciation d'un juge préalablement saisi par les représentants du personnel.

Ces mesures seront donc examinées, en principe, entre le 9 et le 11 janvier prochain au Parlement. Mais il ne s'agit que d'un timide projet, un peu plus contraignant que ce qui se fait mais qui n'empêcherait nullement les entreprises de recourir autant qu'elles le souhaitent aux CDD.

Pourtant, dès l'annonce de ce projet, les patrons se sont une fois encore insurgés : le Medef, la CGPME et l'UPA, dans un communiqué commun, ont déclaré prendre «connaissance avec consternation» des décisions arrêtées par la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale sur le recours aux contrats à durée déterminée. Pour ces organisations patronales, ces mesures «sans aucune concertation préalable sont graves car elles nuisent à l'emploi et pervertissent le dialogue social». Dans certains secteurs, le recours aux CDD est très important : 17 % dans l'agriculture, 10 % dans l'hôtellerie-restauration et 18 % dans le bâtiment, et les patrons veulent pouvoir embaucher et débaucher à leur guise.

A l'approche des échéances électorales, Jospin et ses ministres essaient de faire quelques gestes vis-à-vis de leurs alliés de la gauche plurielle. Mais leurs tergiversations montrent en même temps qu'ils ne veulent rien faire qui puisse importuner le patronat.

Pourtant, c'est l'interdiction pure et simple du travail précaire qu'il faudrait imposer.

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